"Il faut travailler, couper et décaler"
Publié le : mardi 29 mars 2005







Dans les bis­trots de Ouaga et de toute l’Afrique de l’ouest, on ambiance avec le coupé décalé. Cette musi­que à des codes. Quand on dit qu’il faut "tra­vailler", cela signi­fie qu’il faut donner de l’argent au Dj. Pratique d’aujourd’hui, vérité d’hier. Les ciné­phi­les l’ont bien remar­qué dans le film de Sembene Ousmane, Borom Sarret.

Dans une chro­ni­que de son temps, Sembene nous raconte avec tout un humour, la vie d’un char­re­tier qui quitte la maison avec pour seule for­tune, une noix de cola offerte par son épouse. En com­pa­gnie de son fidèle cheval Albourah, il va à la recher­che de la pitance quo­ti­dienne. Il gagne un peu d’argent, mais un griot vient lui chan­ter les louan­ges de ses ancê­tres. Deviner que fait notre braver char­re­tier ? Il donne tout son gain au griot. Le soir, notre ami, rentre chez lui, sans le sou, et sans la char­rette qui a été confis­qué par la police.

Ce film, bien que datant de 1962, est d’une actua­lité. Sembene met en évidence deux réa­li­tés. La vie cita­dine d’où est exclue la masse popu­laire, et les ban­lieues qui gar­dent encore l’orga­ni­sa­tion vil­la­geoise.

Autre point : la fierté. Le peu d’argent que notre char­re­tier a put gagner, il le donne à un griot par fierté. Griot d’hier, Dj aujourd’hui. La pro­dada, le fait de chan­ter les louan­ges en ont ruiné plus d’un dans les maquis et autres lieux publics.

Un amour d’enfant Le cinéma c’est le rêve, l’ima­gi­naire. Les enfants ont aussi droit à cette part de rêve que sus­cite un film. Dans la ciné­ma­to­gra­phie afri­caine, très peu sont les films fait pour les enfants. Un amour d’enfant trou­vera cer­tai­ne­ment sa place dans cette thé­ma­ti­que.

Le film de Ben Diogaye Bèye, nous trans­porte dans ce monde si tendre et si émouvant qu’est celui de l’enfance. L’amour y est l’élément cen­tral. Omar, un jeune garçon d’une dou­zaine d’année est amou­reux de Yacine, sa chère chérie, à qui il repro­che de ne pas l’aimer assez. Dispute et réconci­lia­tion comme chez les grands.

Ben Diogaye a sut faire passer dans son film toute la sen­si­bi­lité et l’émotion qui entoure les rela­tions entre filles et gar­çons. Le réa­li­sa­teur fait aussi passer le mes­sage des injus­ti­ces que les enfants décou­vri­ront. Le père de Yacine est obligé d’accep­ter une muta­tion au risque de perdre son tra­vail. C’est la sépa­ra­tion de nos deux amou­reux. Heureusement que la lune est là. Yacine avait dit à Omar, "Quand quelqu’un est loin, si ses amis lui man­quent, il regarde la lune. Au même moment, ses amis aussi regar­de­ront la lune et s’est comme si ils étaient tous ensem­ble."

Candide Etienne
28 février 2005

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