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"Mon métier c’est comédienne c’est pas Fatou La Malienne"
Publié le : dimanche 10 juin 2007

Elle est jeune, belle et talentueuse. Vous avez été nombreux à découvrir en 2001 ses premiers pas au cinéma dans le rôle de "Fatou" dans Fatou la Malienne de Daniel Vigne. Aujourd’hui Fatou enchaîne les tournages les uns après les autres et son talent ne cesse de se confirmer. Mademoiselle Fatou N’Diaye a bien voulu répondre le temps d’un café à quelques-unes de mes questions pour le plus grand plaisir des internautes de Clap noir.

Zoom sur une jeune actrice pro­met­teuse qui n’a pas sa langue dans la poche et dont on n’a pas encore fini d’enten­dre parler.

MEIJI U TUM’SI : En règle géné­rale te reconnais tu dans tes films ? Est-ce que l’image que tu vois à l’écran res­sem­ble à celle que tu t’en fais pen­dant le tour­nage ?

Fatou N’diaye : Il y a très sou­vent un déca­lage entre le moment de l’action et ce qui reste de l’action qui est collée à l’image. Moi je pense que c’est impos­si­ble d’être quelqu’un d’autre même s’il y a tou­jours quel­que chose qui reste de soi. Parce que la matière pre­mière c’est soi même. On ne peut pas com­plè­te­ment dis­pa­raî­tre. On peut chan­ger mais pas dis­pa­raî­tre donc je dois être quel­que part là dans.

Quel est le film dont tu es la plus fière ?

Non, il faut me deman­der ça dans vingt ans.

J’insiste parce que malgré ton jeune âge, tu as déjà un beau par­cours der­rière toi.

Honnêtement je ne sais pas. Tous m’ont apporté quel­que chose. Le pre­mier, FATOU LA MALIENNE, l’his­toire a été très forte parce que j’ai ren­contré de très belles per­son­nes dans l’équipe de tour­nage des comé­diens aux tech­ni­ciens. Et c’était drôle, en deux mois j’ai appris énormément et je me suis vrai­ment amusée. Je me suis moins amusée après le tour­nage quand le film est sorti mais c’est resté une expé­rience très épanouissante.

Puis je te deman­der ce qui t’a le moins amusé après ce tour­nage ?

Ce qui m’a le moins plu c’est qu’avant je n’avais pas envi­sagé le métier de comé­dienne. Je l’ai envi­sagé au moment où on m’a pro­posé un projet qui me sem­blait plus qu’inté­res­sant puis­que j’ai dit oui. Ce qui m’a semblé vrai­ment bizarre c’est que même si le projet était très investi de quel­que chose à dire, moi je le pre­nais comme une fic­tion. Il y avait une his­toire à raconter c’était un reflet de quel­que chose quel­que part et de quel­ques gens. Ce n’était pas un docu­men­taire ! Moi je ne l’ai jamais vu comme ça ni au moment de la lec­ture ni au résul­tat fini. J’ai tenu un moment, après c’est pas un métier d’être FATOU LA MALIENNE. Mon métier c’est comé­dienne c’est pas FATOU LA MALIENNE. C’est quand même impor­tant. Ce qui m’a sidéré c’est d’avoir à me jus­ti­fier.

Comment as tu vécu le succès ?

Je ne l’ai pas mal vécu et je ne l’ai pas bien vécu non plus. Parce que pour moi c’est une notion com­plè­te­ment abs­traite qui ne veut pas dire grand chose. Ce qui veut dire quel­que chose c’est de tra­vailler avec les gens avec les­quels on a envie de tra­vailler. Etre porté sur des pro­jets sur les­quels on est emballé après ce qu’il y a autour c’est quel­que chose que je n’arrive pas à com­pren­dre parce que le prin­cipe même du succès c’est qu’il ne tient à rien.

Quelles ont été tes impres­sions après avoir tourné en Afrique pour la pre­mière fois avec le cinéaste FLORA GOMES dans NHA FALA ?

J’ai retrouvé ma tem­pé­ra­ture interne la plus confor­ta­ble. J’étais à la maison. Un moment je me suis dit que j’allais peut-être me sentir un peu dépay­sée mais au contraire pas du tout c’est quand je suis ren­trée à paris que je me suis sentie vrai­ment dépay­sée. Pour moi il n’y a eu aucune bar­rière même pas de la langue parce qu’il par­lait créole -por­tu­gais que j’avais appris avant de partir pen­dant un mois et demi avec quelqu’un.

En tant qu’actrice, quel est ton rap­port avec la nudité dans le cinéma ?

Pour moi s’il n’y a pas une cohé­rence par rap­port à une his­toire, une ren­contre avec les per­son­na­ges, une ren­contre avec le réa­li­sa­teur. S’il n’y a pas une cohé­rence assez forte dans ces trois piliers pour qu’il y ait de la nudité …l’his­toire peut ne jamais se faire. Ce n’est pas une ques­tion de pudeur parce que je viens du man­ne­qui­nât même dans le man­ne­qui­nât j’esti­mais que si c’était nu et que c’était pure­ment gra­tuit et c’était juste pour faire plai­sir aux gens qui regar­dent en géné­ral je disais non s’il n’y a pas lieu qu’il y ait une scène de nu. C’est d’abord une ren­contre avec un réa­li­sa­teur, une his­toire et des per­son­na­ges s’il y a une cohé­rence dans tout ça, ça peut fonc­tion­ner parce que c’est de moi qu’il s’agit. Effectivement s’il n’y a pas de cohé­rence, j’ai du mal avec la nudité et ça peut aller jusqu’à la guerre. Et comme je n’ai pas envie d’aller jusqu’à la guerre, en géné­ral je suis très claire.

As tu une manière par­ti­cu­lière de pré­pa­rer tes per­son­na­ges ?

Je fais comme à l’école, je prends mon livre de leçon en l’occur­rence mon scé­na­rio, je le mets sous mon oreiller et j’attends que ça rentre. J’essaye de com­pren­dre le per­son­nage et de dis­cu­ter avec et de voir si on a des affi­ni­tés et s’il y a une ren­contre qui se fait jusqu’à ce qu’on devienne pres­que un. Je ne suis pas for­cé­ment pour cette méthode qui consiste à deve­nir com­plè­te­ment le per­son­nage. Il s’agit de com­pren­dre son per­son­nage et de vivre avec pen­dant un moment parce qu’il y a un par­cours à avoir avec, le plus long­temps pos­si­ble sans pour autant trop s’atta­cher pour pou­voir le quit­ter sans trop de dif­fi­culté. C’est très dur de quit­ter un per­son­nage parce qu’un per­son­nage c’est aussi l’his­toire d’un tour­nage, de plu­sieurs ren­contres ; c’est une grande his­toire avec plein d’his­toi­res à l’inté­rieur. Quitter un per­son­nage c’est aussi dire au revoir et j’ai beau­coup de mal à dire au revoir.

Moi je dis ça par rap­port au métier de comé­dien. C’est qu’on vit quel­que chose de très fort pen­dant un moment de soi à soi et des autres à soi. Il y a quel­que chose de très fort qui se cons­truit fina­le­ment on est juste des noma­des. On cons­truit des palais immen­ses et puis quand c’est fini on souf­fle dessus et puis il faut cons­truire une autre maison un plus loin mais pas sur le même endroit c’est pas pos­si­ble.


Je tiens à signa­ler à tous nos inter­nau­tes que vous pour­rez pro­chai­ne­ment décou­vrir un nou­veau "palais immense" de FATOU en 2005 dans vos écrans dans SOULI, le der­nier film de ALEXANDER ABELA où elle confirme une fois de plus son talent aux côtés de MAKENA DIOP, AURELIEN RECOING, et de JEANNE ANTEBI.

Propos recueillis par MEIJI U TUM’SI
le 26 novem­bre 2004 à Paris
Copyright MEIJI U TUM’SI

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