Accueil du site > Archives > 2003 > les festivals africains de cinéma vers la création d’une coordination (...)
les festivals africains de cinéma vers la création d’une coordination !
Publié le : jeudi 4 janvier 2007

Si en Europe les festivals de cinéma se créent et se perpétuent avec une certaine aubaine, il n’en est pas de même en Afrique et moins qu’en Asie et en Amérique latine. En dehors de quelques festivals qui ont une main mise importante de l’Etat (Fespaco, Carthage) et Ecran Noire avec un Bassek derrière, les autres après une décennie d’existence commencent à patauger dans des difficultés financières et organisationnelles.

Envie de mieux s’orga­ni­ser ou tout sim­ple­ment action événementielle, voici pour une énième fois une situa­tion favo­ra­ble au déve­lop­pe­ment du cinéma d’Afrique. Une oppor­tu­nité.

Nous autres tiers-mon­dis­tes avons du goût. Nous avons pris plu­sieurs déci­sions qui n’ont jamais eu de suites.

A Ouagadougou du 9 au 11 octo­bre 2001, l’Agence Intergouvernementale de la Francophonie (AIE) a mis des gros moyens pour créer une GIE de dis­tri­bu­tion et d’exploi­ta­tion des films en Afrique. A l’heure actuelle il n’en ai rien sorti de cette ren­contre à laquelle pour­tant ont par­ti­cipé tous les grands cinéas­tes du conti­nent et les pro­fes­sion­nels euro­péens du cinéma afri­cain. Pourquoi ?

Du 18 au 20 juin der­nier la Coordination Européenne des fes­ti­vals de cinéma (CEFC) a orga­nisé à Bruxelles un sémi­naire ate­lier sur le thème " Relations entre fes­ti­vals euro­péens et fes­ti­vals du sud ". Entendez par sud tous les pays dit du tiers monde (Afrique, Asie, Amérique latine). En orga­ni­sant cette ren­contre la CEFC vise notam­ment à créer des rela­tions étroites et fruc­tueu­ses avec les fes­ti­vals du sud, mais sur­tout de favo­ri­ser la cir­cu­la­tion des films euro­péens dans les pays où l’hégé­mo­nie amé­ri­caine domine le marché à plus de 98 pour cent de part. Ce qui est aussi inté­res­sant c’est que la CEFC va trou­ver les moyens de faire dif­fu­ser les films afri­cains dans les fes­ti­vals d’Europe. Il faut rap­pe­ler que la CEFC créée en 1995 regroupe 160 mem­bres qui sont des mani­fes­ta­tions cultu­rel­les dyna­mi­ques bien encrées chez eux avec des res­sour­ces finan­ciè­res impor­tan­tes.

Si en Europe les fes­ti­vals de cinéma se créent et se per­pé­tuent avec une cer­taine aubaine, il n’en est pas de même en Afrique et moins qu’en Asie et en Amérique latine. En dehors de quel­ques fes­ti­vals qui ont une main mise impor­tante de l’Etat (Fespaco, Carthage) et Ecran Noire avec un Bassek der­rière, les autres après une décen­nie d’exis­tence com­men­cent à patau­ger dans des dif­fi­cultés finan­ciè­res et orga­ni­sa­tion­nel­les. L’oppor­tu­nité qui s’est pré­sen­tée à nous à Bruxelles est très inté­res­sante et il y a lieu de se poser quel­ques ques­tions.

D’abord, en quoi cette ren­contre est-elle impor­tante pour les fes­ti­vals du Sud et notam­ment afri­cains ?

Des échanges de pro­gram­mes Si le fes­ti­val afri­cain draine un public fou pen­dant l’événement c’est d’abord pour le besoin de l’Africain de voir son image. Un film de Gaston Kaboré fera plus d’entrée au Niger que n’importe quel chef d’œuvre euro­péen pro­jeté dans les mêmes condi­tions. La seule alter­na­tive envi­sa­gea­ble dans pareil cas, c’est la mise en place d’une énorme machine de pro­mo­tion des films euro­péens dans les fes­ti­vals afri­cains avec comme élément fon­da­men­tal la pré­sence des gros­ses poin­tu­res de ce cinéma (comé­diens, réa­li­sa­teurs de renom…). Ainsi tout le monde va gagner. Sinon toute pro­gram­ma­tion faite comme à l’accou­tumé risque à très court terme de vider les salles et de dis­cré­di­ter les fes­ti­vals. Comment le fes­ti­val afri­cain va t-il dis­po­ser d’un cata­lo­gue de films à mettre à la dis­po­si­tion de la CEFC afin d’assu­rer la dif­fu­sion en Europe ?

Des échanges d’infor­ma­tions, d’expé­rience et du trans­fert des bonnes pra­ti­ques. Le cinéma euro­péen, peut-il servir de cinéma d’éducation en Afrique ? Si la col­la­bo­ra­tion doit se nouer entre nous, il s’avère néces­saire de com­men­cer à penser com­ment uti­li­ser le cinéma euro­péen pour sen­si­bi­li­ser et éduquer à l’image le jeune public afri­cain.

Les ciné­mas d’Afrique ont besoin de façon­ner des nou­veaux spec­ta­teurs. Mais, le para­doxe est que rares sont les fes­ti­vals qui font des opé­ra­tions adap­tées au contexte. Presque tous accom­pa­gnent les films par des ren­contres entre publics et pro­fes­sion­nels du cinéma à tra­vers les ate­liers et sémi­nai­res de for­ma­tion. On fait comme à Cannes. C’est bien ! Mais aussi cette appro­che ne peut être ren­ta­ble que si elle s’ins­crit dans une option per­ma­nente. La lutte pour le déve­lop­pe­ment du cinéma afri­cain doit obli­ga­toi­re­ment passer par l’éducation à l’image. Former des spec­ta­teurs intel­li­gents et cri­ques. Personne d’autre appa­rem­ment ne fera ce tra­vail que les pro­fes­sion­nels des fes­ti­vals. Même s’il existe des ins­ti­tuts et cen­tres de for­ma­tion aux tech­ni­ques audio­vi­suels et du cinéma, dans aucun de ces pays encore l’éducation à l’image ne fait parti du pro­gramme sco­laire. C’est ici que doit inter­ve­nir la coo­pé­ra­tion avec les fes­ti­vals du Nord notam­ment. Elle doit se situer dans les acti­vi­tés secondai­res des fes­ti­vals, c’est à dire, en dehors des évènements.

Et cette der­nière ren­contre de Bruxelles nous a permis de décou­vrir l’impor­tant tra­vail fait par les fes­ti­vals euro­péens à l’endroit de leur public.

Même si sou­vent l’on veut faire croire que le temps de pater­na­lisme est ter­miné, les fes­ti­vals afri­cains au stade actuel ont plus à appren­dre qu’à donner. A appren­dre dans les actions spé­ci­fi­ques menées à l’endroit des jeunes de rues et des sco­lai­res, dans la for­ma­tion du per­son­nel ensei­gnant, du per­son­nel extra sco­laire, dans l’éducation non for­melle à l’audio­vi­suel, dans l’accès du cinéma aux per­son­nes en dif­fi­cultés, dans la sen­si­bi­li­sa­tion du public aux thé­ma­ti­ques de société, etc.

Si nous avons besoin d’une coor­di­na­tion afri­caine des fes­ti­vals de cinéma forte à l’instar de celle qui existe en Europe il nous faudra beau­coup nous sur­pas­ser. Qu’elle se crée coûte que coûte, ne serait-ce que pour le lob­bying dans un pre­mier temps, défen­dre les inté­rêts de ses futurs mem­bres auprès de leurs ins­ti­tu­tions natio­na­les. C’est pour­quoi nous avons donné quitus au Fespaco de Ouagadougou de voir com­ment conce­voir cette orga­ni­sa­tion. A Bel’Arte de Dakar de pré­pa­rer les textes. A Ecran noir du Cameroun, Ecran libres du Mali et au Festival inter­na­tio­nal du film pour l’enfance et la jeu­nesse de Tunisie de faire des pro­po­si­tions du lieu de ras­sem­ble­ment.

Cette fois-ci je pense que, l’avè­ne­ment créé par la CEFC nous aidera à réel­le­ment nous orga­ni­ser.

Ousmane Ilbo MAHAMANE Producteur / Coordonnateur géné­ral Rencontres du Cinéma Africain de Niamey " RECAN "

Également…
1

Clap Noir
Association Clap Noir
18, rue de Vincennes
93100 Montreuil - France
Tél /fax : 01 48 51 53 75