50 ans de cinéma africain ! Un patrimoine inestimable de 700 films. La Cinémathèque Française s’intéresse pour la première fois à ces œuvres injustement négligées. « Enfin ! » se sont exclamés les membres de Clap Noir. Plus de 80 films sélectionnés, un festival qui va durer 2 mois, des avant-premières, des invités prestigieux ; un premier pas vers la reconnaissance.
Au cours de la soirée d’inauguration, Serge Toubiana, directeur de la cinémathèque et Costa Gavras son président, se sont excusés d’avoir attendu si longtemps pour programmer des films africains. C’est d’ailleurs pour rattraper ce retard qu’ils ont décidé de le compenser par deux mois de festival. Puis le public a poliment applaudi la liste interminable de remerciements à tous les partenaires. Jean-Marie Bockel, secrétaire d’état à la coopération et à la francophonie a pris la parole. Après avoir fait l’apologie de la carrière prestigieuse de Costa Gavras, notre cher sous-ministre s’est plongé dans ses fiches pour un long et fastidieux discours sur le cinéma africain qu’il semblait découvrir.
Enfin, tous les réalisateurs ont été appelés sur scène pour une photo de famille. Gaston Kaboré, le seul à qui on a laissé la parole, a apprécié la démarche de la cinémathèque, mais a regretté cette longue attente pour la reconnaissance du cinéma africain et de ses réalisateurs talentueux.
Puis une petite révolution se fait dans la salle. On entend « Et les femmes ! Aucune femme n’a été appelée sur scène ! ». La réalisatrice Ramatou Keïta prend le micro et rappelle que son film a été sélectionné à Cannes et gagné un prix au festival de Sundance. Elle constate très justement qu’il n’y a aucune femme dans la programmation.
Après la projection du magnifique film d’Ousmane Sembane « Le Mandat », un cocktail était organisé. En discutant avec Cheik Doukouré, je constate que son film « Paris selon Moussa » n’est pas sélectionné. Il me dit qu’il n’est pas étonné car son film fait peur. De même pour « Bako, l’autre rive », un film toujours d’actualité sur l’immigration tourné en 1980.
Ce qui a poussé notre équipe à éplucher de nouveau le programme. Et nous avons trouvé ce qui nous titillait depuis le début. Quelques pépites dissidentes n’étaient pas sélectionnées non plus. « Paris selon Moussa » traite des sans papiers. Pas de film non plus sur le rôle de l’armée française en Afrique comme le chef d’œuvre de Ousmane Sembène « Le camp de Thiaroye ». Exit aussi le film « Sarraounia » de Med Hondo (Fresque historique sur la résistance sanglante d’un village nigérien contre l’invasion coloniale française et musulmane), étalon de Yennenga en 1987. De même que « Tasuma » de Sanou Kollo Daniel, sur l’abandon après la guerre des tirailleurs sénégalais.
Malgré ces quelques « amnésies », on ne peut négliger l’occasion qui nous est donnée de rattraper ses lacunes grâce au Festival. Durant deux mois, Africamania nous permet de découvrir un patrimoine immense de films, en attendant de découvrir une cinématographie plus contemporaine, riche et variée, et cela mérite le détour.
A cette occasion, une publication est éditée, forte intéressante, comprenant des éditoriaux, des témoignages, des analyses, des portraits et un guide des cinéastes qui reste incomplet.
Combien de temps encore faudra t’il pour que les cinéastes africains, hommes et femmes aient la place qu’ils méritent dans le panorama cinématographique mondial. Mais surtout dans les consciences collectives comme un cinéma de qualité au même titre que le cinéma iranien, indien ou coréen.
Isabelle Audin (Clap Noir)
Jeu
Un jeu concours sur le cycle de films AFRICAMANIA est en ligne. En 1er prix, deux billets d’avion Paris - Dakar ainsi que des coffrets DVD, des abonnements à la Cinémathèque et des places de cinéma.
Pour visualiser en intégral, le camp de Thiaroye :
Partie 1
Partie 2
Clap Noir
Association Clap Noir
18, rue de Vincennes
93100 Montreuil - France