Du 28 septembre au 5 octobre 2012 se déroulait à Namur (Belgique), la 27ème édition du Festival international du film francophone (FIFF). Vitrine du travail de nombreux cinéastes africains, cette manifestation défend malgré la crise une vision francophone du 7e art. Nicole Gillet, directrice du festival, nous parle de la présence africaine 2012.
Cette année, 17 films africains ont été sélectionnés à Namur. Que pensez-vous de ce cru ?
Nicole Gillet : C’est un excellent cru, vraiment, et un grand plaisir pour nous de pouvoir présenter autant de films du Sud. Cela faisait longtemps que nous n’avions plus autant de longs-métrages, un choix aussi important et des films de cette qualité. Nous sommes vraiment contents.
Moussa Touré animait cette année une rencontre avec les jeunes du FIFF Campus. Votre festival et lui, c’est une histoire d’amour, non ?
N.G. : C’est une grande histoire (rires). C’est vrai que Moussa est venu présenter son premier film, son second film, ses documentaires, il a déjà été dans le jury... C’est quelqu’un que le public namurois apprécie et nous étions très contents de découvrir son nouveau film à Cannes La Pirogue en mai 2012, ndlr. C’est un habitué mais il a aussi été présent cette année auprès des jeunes parce qu’il a un discours très intéressant vis-à-vis d’eux. Son film La Pirogue présente des jeunes et des moins jeunes qui fuient le Sénégal pour rejoindre l’Europe. Nous voulions aussi expliquer aux jeunes belges que les situations sont complexes et compliquées. C’était une très belle occasion de donner la parole à Moussa et de permettre aux jeunes de l’écouter.
Quel regard ont les spectateurs belges et namurois sur les films d’Afrique ?
N.G. : Depuis de nombreuses années, nous avons mis en place dans le cadre du festival un Pass à la semaine de 25 euros (16399 FCFA) et on se rend compte que certains de nos spectateurs vont voir tous les films africains, d’autres uniquement les films québécois... Donc oui, il y a du public qui est habitué ou en recherche. D’autres encore, vu le bas tarif, osent découvrir et c’est pour nous un plus d’offrir cette découverte.
La réalisatrice sénégalaise Katy Léna Ndiaye et le critique de cinéma marocain Ahmed Boughaba font partie du jury officiel. Faites-vous chaque année le choix de représenter l’Afrique dans cette instance de décision ?
N.G. : C’est un festival de la francophonie donc il est important d’avoir des personnalités francophones différentes. C’est une volonté et un plaisir de pouvoir confronter ces différents regards.
Le jury Émile Cantillon qui récompense le meilleur premier film, ndlr compte lui aussi parmi ses rangs deux étudiantes du Maroc et du Burkina Faso.
N.G. : Nous collaborons avec des écoles de cinéma au Québec, en Suisse et avec l’École Supérieure des Arts Visuels de Marrakech au Maroc, mais aussi avec des festivals tels que le Fespaco pour le Burkina Faso. Dès sa création, ce jury a toujours été destiné à des jeunes de 18 à 25 ans qui se destinent aux métiers du cinéma pour connaître leur regard de jeune sur la francophonie.
Par ailleurs, Des étoiles de la réalisatrice franco-sénégalaise Dyana Gaye a été retenu parmi les 6 projets de votre 9e Forum de production.
N.G. : Nous avons des ateliers et rencontres professionnelles pour favoriser les productions francophones. Tous les ans, des projets du Sud participent à ces ateliers, existent ensuite sur les écrans et sont diffusés chez nous comme cette année Le sac de farine de Kadija Leclere, film belgo-marocain sélectionné en 2011, ndlr. Être une pierre à l’édifice, soutenir ces projets et favoriser la création d’un réseau au sein de la francophonie est extrêmement important pour nous.
Le Fespaco, Écrans Noirs, le Festival du Film de Tanger, Vues d’Afrique sont des partenaires de votre festival.
N.G. : Nous sommes jumelés avec le Fespaco et Vues d’Afrique et nous travaillons avec Écrans Noirs car il est important pour nous de pouvoir jeter des ponts entre les manifestations.
Le magazine panafricain Notre Afrik est aussi partenaire du festival. Souhaitez vous étendre vos collaborations à d’autres médias africains ?
N.G. : Nous accueillons énormément de journalistes du Sud - accueillis ou invités, nos moyens sont limités - pour leur offrir ce regard du cinéma francophone et lire la parole de chacun sur la production d’autres régions du monde.
Par le biais de votre Grand Prix, le Bayard d’Or, et le prix du meilleur premier film, votre festival soutient les sorties en salle en Belgique.
N.G. : Oui, c’est vraiment important. C’est pourquoi nous essayons d’attribuer des aides à la distribution avec nos différents prix. Chose importante, TV5 Monde soutient notre Bayard d’Or grâce à une aide à l’exportation. C’est une aide à l’exportation qui n’est pas utilisable dans le pays producteur. Ce que l’on peut remarquer ces dernières années, c’est que les films primés à Namur sont systématiquement achetés à l’international. L’année dernière, le film de Nadine Labaki Et maintenant on va où ? a été acheté et distribué au Québec. Ce prix TV5 Monde permet donc en francophonie, grâce à cette télévision francophone, une circulation des œuvres.
Alors, selon vous, quel sera l’avenir des cinémas d’Afrique dans cet espace francophone ?
N.G. : J’espère qu’il y aura des subsides pour soutenir la production et la promotion de ces films. Je trouve dommage qu’il n’existe plus d’aides pour les courts-métrages à l’exception du projet Haraka initié cette année par Canal France International, ndlr. Il est important de les soutenir parce qu’ ils peuvent être considérés comme un exercice de style mais il s’agit pour beaucoup d’une carte de visite pour le long. L’avenir dépendra des moyens attribués à ces productions.
Propos recueillis par Claire Diao
Namur 4 octobre 2012
Clap Noir
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