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Tu n’a rien vu à Kinshasa
Mweze Dieudonné Ngangura
Publié le : dimanche 25 octobre 2009

Un film de Mweze Dieudonné Ngangura, Belgique, République démo­cra­ti­que du
Congo, 2009, 90’










SYNOPSIS

Plus de vingt-cinq ans après « Kin-Kiesse », Mweze Ngangura revient à Kinshasa pour donner la parole à ceux qu’on appelle « les vul­né­ra­bles ». Des êtres qui vivent dans des zones où le moin­dre embryon d’Etat a dis­paru. Ils cons­ti­tuent ainsi la 25e com­mune de la ville. Ils se sont orga­ni­sés en vil­lage, avec leur pré­si­dent et leurs conseillers poli­ti­ques et sociaux.

CRITIQUE

Il y a 2 films en un ; d’un côté le réa­li­sa­teur s’inté­resse aux « Vulnérables », per­son­nes orga­ni­sées en micro société comme un groupe d’artis­tes for­mant un vil­lage, un centre d’ han­di­ca­pés ou les « dépla­cés » suite aux conflits armés, des famil­les relo­gées dans des blocs en ruine com­plè­te­ment aban­don­nées par les pou­voir publics.
« Les Vulnérables » vivent dans la ville mais sont com­plè­te­ment mar­gi­na­li­sés du sys­tème social. Oubliés de la société, ils sont à bout. Certains d’entre eux se sont ins­tal­lés dans la 25eme com­mune (il y a 24 com­mu­nes à Kinshasa) nommée pour la cir­cons­tance « Le désert », sorte d’immense ter­rain en friche pota­gère dans le fau­bourg de Kinshasa. La prise de parole est tou­chante, elle inter­pelle ; ainsi un père de famille qui dit en pleu­rant « je viens de Lumbumbashi, je suis congo­lais et je ne peux même pas vivre dans la capi­tale de mon propre pays », ou le pré­si­dent des aveu­gles de la R.D.C. qui incarne l’espoir et l’humour kinois avec son orches­tre « Les jumel­les fou­tues ». Une suc­ces­sion de per­son­nes dignes, sans com­men­tai­res …

De l’autre côté, Ngangura suit les Shégués, enfants des rues, groupe social orga­nisé autour d’un chef ; tous ont en commun d’être ou d’avoir été enfants des rues. Ramasseurs de métal, petits ven­deurs, pros­ti­tués, dea­leurs en tout genre, des cen­tai­nes d’enfants tra­vaillent dans les rues de Kinshasa. Le réa­li­sa­teur tend son micro et leur donne la parole. Témoignage sai­sis­sant d’une ado­les­cente, pros­ti­tuée, déjà mère qui a fuit sa famille à cause d’un oncle trop entre­pre­nant. Où les fillet­tes n’ont guère de valeurs vis-à-vis des hommes et sont mar­gi­na­li­sées.
Toutes les géné­ra­tions sont tou­chées et Ngangura aurait pu en faire un sujet à lui tout seul ; il y a des enfants de « Shégués » qui com­po­sent des bandes et cer­tai­nes for­ment de véri­ta­bles gang, phé­no­mène nou­veau à Kinshasa. Devenus âgés, les « Shégués » sont mau­dits. Accusés de sor­cel­le­rie par la société, ils sont reje­tés des vil­la­ges et sont contraints de finir leur vie dans des « homes » de vieillards gérés par des dons.

Un docu­men­taire très ins­truc­tif rempli d’infor­ma­tions mais qui pèche par sa forme conven­tion­nelle. Au départ, c’était un film de com­mande du minis­tère des affai­res socia­les sur les enfants des rues, qui a avorté… Ngangura l’a élargi aux « Vulnérables ». On aurait aimé une ana­lyse appro­fon­die des phé­no­mè­nes de la société kinoise de l’après-guerre. Les exem­ples ne man­quent pas. C’est plutôt un état des lieux acca­blant - un de plus - réson­nant de la tri­bune des lais­sés pour compte.
Et on reste stu­pé­faits par le cou­rage et la téna­cité de tous ces gens debout, dont l’humi­lité crève l’écran.
Benoît Tiprez

LE REALISATEUR

Mweze Dieudonné Ngangura est né le 7 octo­bre 1950 à Bukavu (RD du Congo). Diplômé de l’Institut des Arts de Diffusion (Bruxelles) en 1975, il devient chargé de cours dans trois ins­ti­tuts supé­rieurs de Kinshasa. Depuis 1986, il tra­vaille comme cinéaste indé­pen­dant et pro­duc­teur (au sein de Sol’oeil-Films). Il a fondé à Bruxelles, où il réside, la société Films-Sud avec pour objec­tif le déve­lop­pe­ment des rela­tions inter cultu­rel­les et la coo­pé­ra­tion audio­vi­suelle entre le Nord et le Sud.

Filmographie

Tamtam électronique (1973), fic­tion (25’), 16mm
Rythm and Blood (1975), fic­tion (25’), 16mm
Chéri-Samba (1980), docu­men­taire (26’), 16mm, cou­leur
Kin-Kiesse ou les joies douces-amères de Kinshasa-la-Belle (1983), docu­men­taire (28’), 16mm, cou­leur
La Vie est belle (coréal. Benoît Lamy, 1987), fic­tion (87’), 35mm, cou­leur
Changa-Changa / Rythmes en noir et blanc (1992), docu­men­taire (59’), 16mm, cou­leur
Le Roi, la Vache et le Bananier (1994), docu­men­taire (60’), 16mm, cou­leur
Lettre à Makura : les der­niers Bruxellois (1995), docu­men­taire (25’), Beta SP, cou­leur
Le Général Tombeur (1997), docu­men­taire (26’), 16mm, cou­leur
Pièces d’iden­ti­tés (1998), fic­tion (93’), 35mm, cou­leur
Au nom du père (2000), docu­men­taire (50’), Beta SP, cou­leur
Les habits neufs du gou­ver­neur (2005), fic­tion 90’

FICHE TECHNIQUE

Réalisation : Mweze Ngangura
Image : Guérin Mambi Awo-Risonga
Son : Richard Mbembi.
Montage : Marie-Hélène Mora.
Mixage : Ophélie Boully.
Musique : Gikain Zimele Futi, Balema et l’Orchestre Ava-Musica.
Commentaires dits par Dieudonné Kabongo.
Contact : Les Films-Sud Chaussée d’Ixelles 233
1050 Bruxelles, Belgique. Tel. : +32 02 230 46 07 Email : film­ssud chez hot­mail.com

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