Douze ans après Heremakono, « En attendant le bonheur » le film qui lui valut l’Etalon du Yenenga, en 2003, Abderrahmane Sissako revient, les bras chargés de trophées gagnés ailleurs avec son dernier film Timbuktu, en sélection officielle. Tous, impatients de se faire leur opinion sur le film aux 7 Césars. Discussions passionnées et bousculades en perspective à l’entrée du Neerwaya, plutôt qu’à l’Institut Français, sécurité oblige…
Malheureusement, au moment où nous publions cet article, nous apprenons la possible déprogrammation du film en compétition officielle. « C’est céder à la peur, c’est dommage », a insisté le réalisateur sur le plateau du « Grand Journal » de Canal+ mercredi 25 février. À suivre …
A quelques jours de la cérémonie d’ouverture du 24ème FESPACO le samedi 28 au Palais des Sports de Ouaga 2000, les déclarations officielles cèdent le pas à une avalanche de scoops, bruits de couloir, ragots, légendes urbaines. Etc… Le FESPACO revient de loin, longtemps menacé par l’avancée de l’épidémie EBOLA . La grande rencontre des cinémas d’Afrique a frôlé l’annulation pure et simple. Quant à la situation politique, conséquence de l’insurrection populaire du 30 octobre 2014, si elle en enthousiasme beaucoup, peut refroidir les plus craintifs. Pour ceux là, d’ailleurs, il y a aussi Boko Haram qui se rapproche…
Au chapitre des bonnes nouvelles : le numérique fait son entrée triomphale, promesse (tenue) du dernier Fespaco, les salles sont équipées et plus aucun réalisateur ne restera à la porte ; les films de la Diaspora sont intégrés dans la sélection officielle et non pas relégués comme auparavant dans une catégorie spéciale.
Du coup, (est-ce un hasard ?), c’est un président du jury anglophone, le réalisateur ghanéen Kwaw Ansah, lauréat de l’Etalon en 1989 pour son film « Héritage Africa », qui mènera les débats. Comme chaque année au FESPACO un pays est à l’honneur : cette année ce sera l’Egypte. C’est un film burkinabè au titre non encore révélé, qui fera l’ouverture le samedi 28 à 21h au ciné Burkina.
Alors que radio trottoir donnait le siège du FESPACO privé de toutes soirées, un démenti officiel réinstalle les soirées musicales avec la profusion habituelle de maquis où boire et manger toute la nuit, Ouf ! Par contre, la rue marchande qui attirait foule de marchands et de chalands est bien annulée. Pareil pour les cérémonies d’ouverture et de clôture, éminemment populaires dans l’immense stade du 4 Août, entrée gratuite, énorme fête où le cinéma n’était qu’un prétexte d’ailleurs, sont délocalisées à Ouaga 2000, (le virus EBOLA ne connaissant pas la route sans doute ! ) dans un stade couvert de 5000 places , Ismaël Lo, chanteurs et danseurs pour ambiancer et un immense écran géant à l’extérieur pour ceux qui trouveront l’argent pour aller si loin ….
D’où des hochements de tête dubitatifs notés au hasard de la rue, taxis, marchandes, qui ne voient pas les espoirs de changement se concrétiser. « Rien ne change, si ça continue on va devoir encore aller marcher ! »
A tout seigneur tout honneur, grande place sera donnée à la mémoire de Thomas Sankara, antépénultième président trop peu resté, trop tôt parti, figure mythique et créateur du Pays des Hommes Intègres. Le réalisateur Balufu Bakupa Kanyinda, lui-même auteur du film Thomas Sankara (1991), a créé le prix Thomas Sankara, décerné par la Guilde des réalisateurs, qui récompense un court métrage, prix financé par Canal+.
Le jeudi 26 février, au Credo Media, à 10h, en avant-première, projection presse de "Capitaine Sankara" du documentaire du réalisateur suisse Christophe Cupelin , 2012, portrait du président basé sur le archives de la révolution. .
Du côté du centre Norbert Zongo, Abdoulaye Diallo y organise deux soirées qui feront date : le 3 mars en l’honneur de Thierry Michel , le réalisateur belge qui gratte là où ça fait mal et le 4 mars un soirée Insurrection avec projection de films tournés, la plupart du temps avec les téléphones portables , lors des journées d’octobre 2014 où le peuple s’est soulevé contre celui qui ne voulait plus descendre de son trône, Blaise Compaoré. Ambiance assurée dans ce haut lieu de résistance !
Encore une date bien chaude : le 5 mars, le célèbre rappeur ouagalais Smockey, leader du balai Citoyen annoncera le lancement de son dernier disque .
Autre détail : les professionnels du cinéma et les noctambules associés devront trouver une autre « place to be ». L’Hotel Azalay, anciennement Indépendance et lieu de mémoire du FESPACO depuis sa création, déjà banalisé par les derniers propriétaires, n’est actuellement « plus fonctionnel » selon la version officielle. Les propriétaires sont en train de restaurer à fond l’hôtel mais pas au point de le réouvrir à temps. C’est qu’il a souffert de sa proximité avec l’Assemblée Nationale et des manœuvres de certains députés, les manifestants révoltés ont procédé à un grand nettoyage de la structure, ne laissant que les murs. Ainsi maintes maisons de Ouaga doivent posséder des éléments de décoration chargés d’histoire.
Faites bon accueil aux jeunes de l’ISIS et du Ciné Club qui, parés de leur tee-shirt du Cine Guimbi, vous feront voter pour désigner parmi les 21 Etalons depuis 1972, celui qui aura l’honneur d’être projeté lors de la séance d’inauguration du futur Ciné Gimbi à Bobo-Dioulasso, qui actuellement n’a plus aucun cinéma. Pendant tout le festival, 22 urnes attendent votre bulletin ! Au final, un tirage au sort et un fauteuil à son nom dans cette nouvelle salle.
En attendant le bonheur d’être assis devant un écran qui s’éclaire et vous livre soudain un autre univers !
Vive le cinéma ! Vivement le FESPACO !
Michèle Solle
Clap Noir
Association Clap Noir
18, rue de Vincennes
93100 Montreuil - France