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FIPA 2008
Publié le : jeudi 7 février 2008

Biarritz, du 22 au 27 jan­vier 2008, et pour la 21 édition, avait lieu le FIPA. Festival International de la Production Internationale, rendez vous incontour­na­ble de ceux qui rêvent une télé­vi­sion idéale, indé­pen­dante, intel­li­gente, com­bat­tante, res­pec­tueuse de l’homme et libé­rée de l’Audimat. Des cen­tai­nes d’œuvres dans de nom­breu­ses caté­go­ries, pro­je­tées en salle ou vision­nées au FIPATEL, quand le gâteau est trop gros, on dis­pa­raît sous la crème ! Faut choi­sir ! Parmi les docu­men­tai­res convo­quant un monde dans tous ses états, trois peti­tes pier­res tièdes par­lant de l’Afrique, que j’ai gar­dées au fond de ma poche pour vous.

En atten­dant les hommes
de Katy Lena Ndiaye, Belgique

Oualata, ville rouge à l’extrême est du désert mau­ri­ta­nien et trois femmes qui par­lent tout en déco­rant les mai­sons de banco. Elles par­lent des hommes. Le vent du désert sou­lève le sable rouge. On pense à Heremakono, « En atten­dant le Bonheur », le film d’Abderrahmane Sissako. Chez Sissako, la caméra sui­vait un homme qui atten­dait le moment de l’exil, la barque qui l’emmè­ne­rait au pays des blancs. La vie du vil­lage était réduite aux per­cep­tions de celui qui lui disait adieu. Les bruits étouffés, les femmes pas­saient dans leurs voiles. On sen­tait l’Océan, l’ailleurs. Oualata est à l’opposé, près de la fron­tière malienne, et, (rap­port de cause à effet ?), nulle vel­léité de fuite ne tour­mente ces femmes, qui atten­dent leurs hommes. Elles sont le gage que les hommes revien­dront La vie est ici. On suit leurs gestes ten­dres. Les mains pétris­sent la terre, inven­tent des cou­leurs, cares­sent les murs, créent des reliefs et des formes pré­ci­ses, volup­tueu­ses. Elles se confient. Les yeux noyés de khôl, mou­ve­ments de voiles dans lequel elles se cachent quand la confi­dence touche à l’intime, sou­ri­res com­pli­ces, confiants, tran­quilles, silen­ces, regards. La réa­li­sa­trice les mène avec une infi­nie déli­ca­tesse. « Moi, je sais que je ne suis pas belle, mais les hommes aiment ma conver­sa­tion » déclare celle-ci . Elle en est à son cin­quième mari. Celle–là n’a pas su les garder, la soli­tude lui pèse, ses yeux secs et trop brillants par­lent du manque. La troi­sième, plus jeune et sen­ten­cieuse recule le moment où il lui fau­drait bien perdre ses illu­sions. Le vil­lage pal­pite. Et se réveille un jour à l’arri­vée des hommes, venus d’on ne sait où, du pays de l’argent, ou de celui de l’or, du tra­vail, de l’utile. Et les femmes délais­sent leurs sculp­tu­res, stop­pent leurs confi­den­ces et les accueillent enfin, lais­sant le spec­ta­teur sur cette paren­thèse enchan­tée

Hôspedes da Noite (les hôtes de la Nuit )
Le réa­li­sa­teur mozam­bi­cain est un habi­tué de Biarritz ; il y a déjà reçu le Fipa d’argent en 2003 et 2006 pour ses films Desobediencia et O Grande Bazar .

Dans la ville por­tuaire de Beira, à l’époque colo­niale, le Grande Hotel était le plus grand palace du Mozambique : 350 cham­bres, des suites luxueu­ses, une pis­cine olym­pi­que…. Aujourd’hui 3500 per­son­nes vivent ici. Quarante quatre ans après sa fer­me­ture, le spec­ta­teur accom­pa­gne deux anciens employés, très classe, dans une visite retour aux sour­ces. L’un est aveu­gle, l’autre le guide et lui raconte. Ici étaient le hall d’entrée, la récep­tion, les salons, les cui­si­nes etc. Ils avan­cent dou­ce­ment à tra­vers les gra­vats, emprun­tent des esca­liers en ruine, enjam­bent les étals qui enva­his­sent les cou­loirs. Une lumière sépia accom­pa­gne leurs sou­ve­nirs. Mais la vie est par­tout. L’Afrique a repris ses droits ; comme l’eau sous la porte elle s’est infil­trée dans ce ves­tige du colo­nia­lisme. Les famil­les s’entas­sent jusque dans les caves, les enfants jouent sur les ter­ras­ses, la pis­cine sert de lavoir, de décharge, à tous les étages les odeurs de cui­sine, les petits métiers, le linge qui sèche, les femmes qui s’acti­vent en riant. Une des suites sert de mos­quée, l’autre d’église, le salon de récep­tion de tri­bu­nal des habi­tants. Tous logés à la même ensei­gne, les habi­tants se sont orga­ni­sés au mieux. Aucune trace de nos­tal­gie dans ce docu­men­taire à l’allé­go­rie lumi­neuse.

Memory Books de Crista Graf, Allemagne

En Ouganda. Le sida est passé par là. Les pères ont été empor­tés, les pre­miers. Des mères et de leurs enfants sur­vi­vants, qui mourra en pre­mier ? Pour lutter contre les rava­ges de l’oubli, les femmes ont initié un projet magni­fi­que : les livre des sou­ve­nirs. Jour après jour, elles écrivent, photos et des­sins à l’appui, avec et pour leur fille, leur fils, leur his­toire com­mune, celle de leurs ori­gi­nes, la créa­tion de la famille, les pre­miers pas, les res­sem­blan­ces, les pre­miè­res fois, les espoirs. Afin que dans cette belle Afrique, éternellement punie, les orphe­lins de demain puis­sent exis­ter. Trame de vie jetée par delà la vie, la mort, et la ter­ri­ble loi du maté­riel.

Michèle Solle

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