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Dans les coulisses d’un tournage
Publié le : vendredi 30 janvier 2009
Joséphine Ndagnou tourne "Paris à tout prix"

C’est l’his­toire d’une femme Camerounaise qui rêve d’un « ailleurs meilleur » et qui place ses espoirs dans l’idéal de la grande capi­tale fran­çaise ; Paris !
Elle va tout mettre en œuvre pour réa­li­ser ce rêve : s’y rendre à tout prix, en ne pas­sant pas for­cé­ment par les meilleurs che­mins.
C’est l’his­toire d’une femme qui lorsqu’elle y par­vient, réa­lise que le rêve est sup­planté par la réa­lité, la dure réa­lité qui l’attend.

Comment raconter cette his­toire ? Comment la mettre en image, en faire un film ?
Ce sont les ques­tions que s’est posé Joséphine Ndagnou la réa­li­sa­trice, pour son pre­mier long métrage, avant de ras­sem­bler une équipe tech­ni­que, et de faire venir tout ce petit monde au cœur de la capi­tale pour un tour­nage d’envi­ron sept jours.

Je suis une jeune ethno-socio­lo­gue et je pré­pare un mémoire sur le cinéma afri­cain, c’est en contac­tant l’asso­cia­tion Clap Noir que j’ai appris que le tour­nage d’un film afri­cain avait lieu en ce moment, et ai ensuite pu pren­dre contact avec Annabel Thomas, direc­trice de pro­duc­tion, qui m’a permis d’ y assis­ter. J’ai donc eu la chance de suivre cette équipe deux jours durant, de décou­vrir l’ambiance et les condi­tions de la réa­li­sa­tion d’un projet ciné­ma­to­gra­phi­que.

Le pre­mier jour, c’est dans un appar­te­ment du 16ème arron­dis­se­ment de Paris que l’équipe tra­vaille. J’arrive pen­dant la pause déjeu­ner tout le monde dis­cute, à droite à gauche, une assiette en plas­ti­que à la main. Joséphine (la réa­li­sa­trice) n’est pas encore là, m’expli­que-t-on, Annabel non plus d’ailleurs. Je m’ins­talle ; ma pré­sence n’est pas sans sus­ci­ter quel­que inté­rêt, on m’inter­roge sur le type d’études que je fais, les rai­sons de mon inté­rêt pour le cinéma afri­cain, on me féli­cite même !
D’un côté, les acteurs répè­tent leur scène , de l’autre le pro­prié­taire des lieux dis­cute avec les membre de l’équipe tech­ni­que, l’ambiance est déten­due.


Claude Pountu Nyinyi chef opé­ra­teur (dit DP pour les inti­mes "direc­teur photo")

Lorsque Joséphine arrive, on peut com­men­cer ; j’observe les choses se réor­ga­ni­ser petit à petit, Joséphine qui répète sa scène avec les acteurs, la maquilleuse qui effec­tue les retou­ches sur leur visage, les tech­ni­ciens qui met­tent en place la caméra et l’éclairage ; la scène se situera dans la petite cham­bre à l’extré­mité de l’appar­te­ment et sera prise en plan fixe.
Une fois que les bran­che­ments sont bons, la mise au point de la caméra ajus­tée, les répli­ques assi­mi­lées, le tour­nage peut repren­dre. Le cadreur, le per­chiste et les acteurs sont en place, quant à nous (le reste de l’équipe et moi-même), nous sommes ins­tal­lés dans la pièce laté­rale, étant donné le manque d’espace dans la cham­bre où va se dérou­ler la scène. Nous la sui­vons en direct sur l’écran relié à la caméra, la scripte est en pre­mière ligne et prend des notes.
Tout le monde est prêt. « silence s’il vous plaît ! », toutes les dis­cus­sions s’inter­rom­pent, « Moteur demandé ! », le clap reten­tit, « …et Action ! » le silence et l’atten­tion sont à leur comble, une légère pres­sion règne chez chacun d’entre nous… « Coupez ! »… la pres­sion redes­cend, le silence fait place aux com­men­tai­res de Joséphine sur le jeu des acteurs, elle leur expli­que ce qu’elle veut tout en lais­sant libre cours à leur spon­ta­néité. Les acteurs se met­tent plus pro­fon­dé­ment encore dans la peau de leur per­son­nage et on reprend ; « silence ! moteur ! clap, action ! », et ce jusqu’à ce que l’on tienne la bonne prise. A ce moment enfin, toute la ten­sion redes­cend, le silence fait place aux dis­cus­sions et aux rires, l’on revient sur un moment qui nous a fait rire pen­dant la prise… Jusqu’à ce que la mise en place de la scène sui­vante.
Et la jour­née conti­nue ainsi dans une ambiance plutôt déten­due et agréa­ble. Elle se ter­mine lors­que Joséphine est satis­faite de cha­cune des trois scènes que l’on a tour­nées.

Le lundi sui­vant, le tour­nage a lieu dans un petit salon de coif­fure situé rue du Château d’eau. Les mem­bres de l’équipe sont un peu fati­gués étant donnée qu’ils ont tourné tout le week-end et ont ter­miné très tard. Mais, la bonne humeur et les rires sont tout de même au rendez-vous. Il est dix heures, et tout s’orga­nise petit à petit, maquillage, bran­che­ments, répé­ti­tion, ajus­te­ment de la prise de vue…
La pre­mière prise aura lieu à l’inté­rieur du salon de coif­fure… les sui­van­tes à l’exté­rieur ! Et s’avè­rent bien moins évidentes dans la mesure où il faut éviter que les pas­sants natu­rel­le­ment curieux regar­dent la caméra, ou bien faire en sorte de stop­per les voi­tu­res afin qu’elles ne cou­pent pas le champs… Le temps n’arrange rien à nos affai­res il pleut, et les voi­tu­res nous éclaboussent, et il faut faire atten­tion au maté­riel qui risque lui aussi de pren­dre l’eau.
Tout se passe rela­ti­ve­ment bien mis à part le fait que les tenan­ciers du salon per­dent patience et fina­le­ment nous deman­dent de quit­ter les lieux…Nous avons tout de même le temps de faire les der­niè­res prises en vitesse. Nous rem­bal­lons, et par­tons en direc­tion du jardin des tui­le­ries. Où nous l’on tourne une scé­nette dans laquelle l’on m’a demandé de faire de la figu­ra­tion, une pre­mière !!
Le tour­nage s’arrête ici pour moi.


Sosthe Fokam Kamga l’ingé­nieur du son, Joséphine et le DP

Je suis heu­reuse d’avoir pu avoir un aperçu de la réa­li­sa­tion d’un projet de film ; j’ai ainsi pu me rendre compte que cela néces­site un inves­tis­se­ment consi­dé­ra­ble de la part des per­son­nes sol­li­ci­tées, per­sonne n’est inu­tile sur un tour­nage, chacun contri­bue à son bon dérou­le­ment et rem­plit ses fonc­tions avec pro­fes­sion­na­lisme. J’ai été agréa­ble­ment sur­prise de voir que malgré les impé­ra­tifs liés au temps les per­son­nes res­tent agréa­bles et ouver­tes à la dis­cus­sion.

Je m’atten­dais à voir dans le per­son­nage du réa­li­sa­teur une per­sonne très diri­giste, déte­nant une grande partie du pou­voir et que l’on écoute aveu­gle­ment ; j’ai en fait été confron­tée à une femme qui sait ce qu’elle veut, mais laisse porte ouverte à toute sug­ges­tion, au natu­rel et à l’impro­vi­sa­tion des acteurs.
J’ai eu la chance d’assis­ter au tour­nage d’un film dont le scé­na­rio reste la ligne direc­trice, mais où l’on laisse une place à l’aléa­toire, à l’imprévu, où rien n’est irré­vo­ca­ble, et cela cons­ti­tue selon moi une force et une par­ti­cu­la­rité que l’on retrou­vera dans le film une fois monté.

Cécilia Aubry

www.clap­noir.org

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