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Bab’Aziz, Le prince qui contemplait son âme
Nacer Khemir
Publié le : 2005

Un film de Nacer Khemir, ance/Tunisie/Iran/Allemagne/Hongrie/Royaume-Uni, 2005, 96’
Sortie française le 15 novembre 2006






SYNOPSIS

Perdues dans un océan de sable, deux silhouettes cheminent : Ishtar, une petite fille pleine d’entrain, et son grand-père Bab’Aziz, un derviche aveugle.
Elle le guide vers la grande réunion des derviches qui a lieu tous les trente ans, mais pour trouver cet endroit secret, il faut « écouter le silence infini du désert avec son coeur ». Leur voyage à travers l’immensité brûlante les amène, tel un jeu de pistes, à la croisée d’autres destins : Osmane, qui cherche un palais en plein désert... Zaïd, dont le chant a séduit une femme à la beauté irréelle qu’il a perdue depuis... Hussein, un jeune homme en quête d’un autre monde...
Il y a aussi ce conte ancien que raconte bab’Aziz à Ishtar tandis qu’ils progressent péniblement dans le sable, l’histoire de ce prince qui a abandonné son royaume pour devenir derviche.
Et le désert finira par révéler son secret...

« Le désert est à la fois un champ littéraire et un champ d’abstraction. C’est un des rares lieux où se réunissent à la fois l’infiniment petit, un grain de sable, et l’infiniment grand, des milliards de grains de sable, le désert.(...) Dans chaque mot arabe qu’on prononce, il y a un peu de sable qui suinte. »
N. Khemir

LE REALISATEUR


Né à Korba, en Tunisie, Nacer Khemir est un artiste aux multiples facettes, entre peinture, sculpture, calligraphie et écriture. Conteur, il se produit à deux reprises au Théâtre nationale de Chaillot avec « Les Milles et Une Nuits » en 1982 et 1986. Avec une nouvelle histoire chaque soir, il comptabilise alors plus de vingt-cinq heures de récit. Ses films, pour la télévision comme pour le cinéma, sont imprégnés de l’univers du conte, de sa poésie et de son oralité. « Bab’Aziz » clôt une trilogie ayant pour décor le désert et dont font partie ses précédents films « Les Baliseurs du désert » (1984) et « Le Collier perdu de la Colombe » (1991)

Filmographie

1975 : Le mulet
1975 : Histoire du pays du Bon Dieu (LM)
1977 : L’ogresse (TV)
1978 : Sommaa
1991 : A la recherche des Mille et une Nuits (TV)
1984 : Les baliseurs du désert (LM)
1991 : Le collier perdu de la Colombe (LM)
2005 : Bab’Aziz (LM)

CRITIQUE

Bab’Aziz et sa petite fille Ishtar cheminent de dune en dune. Ils savent où ils vont – à la grande réunion des derviches. Mais ni l’un ni l’autre ne connaissent l’itinéraire à suivre. En effet, la voie qui conduit à la fête est avant tout un cheminement intérieur.
Le film de Nacer Khemir est une quête. Comme dans un conte, ce que les personnages vont trouver au bout du chemin a moins d’importance que le trajet lui-même. Car la route est parsemée de récits et de personnages qui éclairent chacun à leur manière un petit bout du mystère. Et ce mystère, c’est l’islam, une spiritualité que le réalisateur a voulu représenter sous sa forme soufi. Une religion fondée sur l’amour, où règne l’échange et non la violence, où l’accomplissement est avant tout intérieur. Une sagesse qui traverse le film de part en part. Les personnages se rencontrent, se quittent et se retrouvent pour mieux figurer un cycle basé sur la transmission. Ishtar écoute les histoires de son grand-père, les habits de derviches reviennent à celui qui a suffisamment regardé en lui-même pour trouver la paix intérieure. Et surtout, la musique et la poésie sont les fils conducteurs privilégiés, liens entre les personnages et substance du récit.
Le désert renvoie à l’origine même de la langue arabe, des mots sublimés par la poésie du Moyen-Age et chantés par les personnages. Source de vie, la musique provoque la rencontre, elle permet au corps de s’exprimer, comme dans cette scène presque irréelle où Ishtar et son grand-père dansent devant des musiciens rencontrés au milieu du désert. En miroir à l’oralité traditionnelle, l’image est elle aussi poésie. Si Nacer Khemir aime la parole, il sait que sa force est dans sa capacité à évoquer des formes, des couleurs et du son. Les étendues de sables, paysages de solitude où l’homme est face à lui-même, sont le décor privilégié de ces histoires qui se superposent pour mieux trouver leur signification les unes par rapport aux autres.
Peut-être le personnage d’Ishtar est-il le seul à ne rien chercher d’autre que cette réunion de derviches, cet abandon total dans la fête comme peut le désirer un enfant. La petite fille est dans cet entre-deux, un désir encore naïf de plénitude associé à une gravité d’adulte lorsqu’elle écoute les récits de tous ceux qui recherchent l’amour, réel ou symbolique. Bien loin de l’enfance ou des désirs des hommes, le vieillard Bab Aziz veut retrouver dans son dernier voyage la connaissance originelle de l’univers. Une sagesse absolue qui n’appartient décidément pas au monde physique.

Julie Pétignat Clap Noir

FICHE TECHNIQUE

Scénario et réalisation : Nacer Khemir
Avec : Parviz Shahinkhou, Maryam Hamid, Nessim Kahloul, Muhammad Grayaa, Golshifteh Farahani
Image : Mahmoud Kalari
Assistant réalisateur : Benjamin Blanc
Son : Stuart Wilson, Steve Higgs, Bahman Bani Ardalan
Montage : Isabelle Rathery
Décors : Nacer Khemir
Monteur son : Franck Desmoulins, Amir Hossein Ghaseni
Mixeur : Robert Juhasz
Costumes : Maud Perl
Format : 35 mm (1:85) - DTS
Coproduction : Les Films du Requin (France), Behnegar Film (Iran), Pegasos Film (Allemagne), Hannibal Films (Tunisie), Inforg Studio (Hongrie), Zephyr Films (Royaume uni)
Production : Cyriac Auriol, Ali-Reza Shojanoori
Distribution : Gebeka Films, www.gebekafilms.com

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