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Au-delà de la peine
Osvalde Lewat
Publié le : 2006

Un film d’Osvalde Lewat, Cameroun, 2004, 52’







SYNOPSIS

Ce documentaire retrace la vie du plus vieux prisonnier du Cameroun. Léppé, condamné à 4 ans de prison en novembre 1969, qui en sortira finalement 33 ans plus tard, en août 2002. Ecopant d’une addition de peine suite à trois tentatives d’évasion de la prison centrale de Yaoundé, Léppé ne devait retrouver sa liberté qu’en 2028. Il serait actuellement toujours en prison sans l’intervention d’associations de défense des droits de l’homme, de feu Mr Wouking, Archevêque de Yaoundé. Osvalde Lewat nous raconte cette histoire invraisemblable.

A PROPOS DU FILM

Je ne saurais me souvenir avec exactitude du jour où j’ai décidé que l’histoire de Léppé devait être racontée, devait faire l’objet de mon prochain documentaire. J’ai une certitude : ce n’est pas au moment où j’ai appris qu’une telle horreur existait. Je me souviens pourtant très précisément des battements accélérés de mon cœur. De mon angoisse, de ce nœud étouffant dans ma gorge, de cette sensation irréelle de me balancer au-dessus du vide.

On me demande souvent " comment avez-vous découvert cette histoire ? " La vérité est que c’est cette histoire qui est venue à moi. Je ne l’ai pas cherchée. Comment l’aurais-je pu autrement que dans une fiction ? Un homme incarcéré depuis trente-deux ans au Cameroun ? J’essaie d’avoir le sourire dubitatif de ceux qui refusent une réalité qui s’impose à eux. Et puis, il s’agit de mon pays que j’adore et que je défends toujours.

Je décide de rencontrer celui qui pour moi à l’époque n’a qu’une étiquette " prisonnier. " Je m’attends à trouver quelqu’un d’amer, de revanchard, complètement brisé par la vie. Je réalise rapidement que c’est moi la prisonnière. Prisonnière des schèmes que j’ai esquissés dans mon esprit. Prisonnière de ce que je crois être la vraie vie, celle de la liberté et du confort. L’homme que je rencontre est tout sourire. Il est curieux de ma curiosité. Il n’attend rien de moi. Il n’espère plus rien de personne depuis longtemps. Moi je suis là, en face de lui, prête à m’émouvoir et à servir ces phrases toutes faites que j’ai préparées et que j’estime de circonstance. Aucune ne franchit le seuil de mes lèvres. C’est lui qui parle. Un vrai flot. Silencieuse, médusée, j’écoute. Benoîtement. Je le quitte bouleversée. Je suis décidée à remuer ciel et terre pour qu’on sache que cet homme existe. Que cette injustice existe. Je cogne à des portes qui me renvoient en échos mes propres coups. Elles demeurent closes.

Des semaines passent. Nous sommes à l’approche de Noël. J’ai d’autres préoccupations plus personnelles qui me happent. Je suis dans le tourbillon de mes préparatifs festifs. Une lettre arrive. Sans reproche, sans rancœur. C’est le " prisonnier. " Elle se résume en une série de mots qui m’atteignent : " vous comprenez pourquoi cela fait trente-deux ans que je suis là. Les gens viennent, compatissent, repartent. C’est normal, ils ont leur vie. "

Plus que tout, pire que tout, je culpabilise. Je me suis vite lassée de ne pas trouver de soutien autour de moi. Le soir au coucher, je relis pour la énième fois la très courte lettre. Je me fais une promesse. Je vais raconter son histoire. Ici et ailleurs. Avec une caméra. Je vais le faire pour lui qui n’attend plus rien de la vie. Pour moi qui en espère encore tout. Je vais aller jusqu’au bout. Je vais aller au-delà de sa peine…
Osvalde Lewat

LA REALISATRICE


Journaliste de formation, Osvalde Lewat est née en septembre 1976 au Cameroun. Elle a écrit dans " Cameroun tribune " des articles à caractère culturel ou social. Issue d’une formation à l’Institut National de l’Image et du Son (INIS) de Montréal, elle signe son premier documentaire en 2000 " Le calumet de l’espoir ". En 2001, " Les destinées ", un nouveau documentaire, contribue à la faire remarquer.
Après une courte formation à la FEMIS à Paris, elle réalise en 2002 " 140, rue du Bac ", un documentaire sur la vie d’une religieuse. Ce qu’on pressentait alors se confirme, Osvalde Lewat est intéressée par les gens, leur vie, leurs espoirs, leur destin. " Au delà de la peine " est son dernier documentaire, tourné en 2002 dans la prison centrale de Yaoundé.

CRITIQUES DE PRESSE

Ce qui m’a frappée tout de suite dans ce film c’est le traitement intelligent et sans prétention de la libération et de la vie de ce prisonnier peu ordinaire. Le regard de la réalisatrice est juste et sans complaisance ; ainsi, les conséquences de la corruption sont à double sens : on " arrose " le système judiciaire camerounais pour accélérer la procédure de libération et on s’aperçoit, au fil des années, que cela ne sert pas à grand chose car on ne retrouve même plus les pièces à charges " éparpillées " dans les administrations. Conséquences : le dossier se creuse de l’intérieur.

Le plus passionnant peut-être, c’est le regard de cet homme sur sa société, son pays et sa famille. Ce personnage philosophe est attachant, humble, toujours digne ; il analyse, tout, sans haine ni colère ; il assume ses fautes et se fond dans une société qui est la sienne. La jeune réalisatrice a su nous montrer la force de vie de cet homme, en toute sincérité, et on se mêle, au fil du film, à son témoignage pour partager son sens de la vie.

Florence Miette (Clap Noir)

FICHE TECHNIQUE

Auteur-Réalisatrice : Osvalde Lewat
Assistée de Eloi Bela
Images : Claude Pountu, Louis-paul Ntsa Teme, Michel Mama
Montage : Denis Le Paven assisté de Emmanuelle Lacosse
Son : Antoine Mbesse Amougou
Mixage : Hubert Atangana
Musique : Hubert Atangana
Vidéo 52 mns, DVC-PRO, diffusion BétaSP
Distribution : Waza Images wazafilms chez voila.fr
Contact : Osvalde Lewat, 59 Bd Gallieni 92130 Issy Les Moulineaux
Tél/fax : 01 46 42 02 93 , osvaldelewat chez hotmail.com

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