Les chroniques tunisiennes
Publié le : samedi 25 octobre 2008
22eme édition du 25 octobre au 1er novembre 2008

On se bouscule au deuxième étage de l’hôtel Africa siège des JCC. La machine à fabriquer les badges fait de la résistance. La raison ????
Toujours est-il qu’on peut deviner, à la capacité de garder leur sang froid, la nationalité des plaignants : les nordistes restent zen, les sudistes s’énervent !!!! Bref, au bout de nombreuses visites, j’ai enfin obtenu…le badge d’une cinéphile tunisienne, en attendant le mien ! Toujours ça !

Tunis est la ville idéale pour un festival de cinéma. Toutes des salles sont groupées autour de l’avenue Habib Bourguiba, les hôtels du festival également. Il ne reste qu’à traverser, sans se fier aux feux rouges toutefois et un œil sur le métro (un tramway en fait) que l’on n’entend pas arriver.
Des terrasses partout pleines d’hommes, et des arbres pleins d’oiseaux. Un temps étrange qui aligne ciel bleu soleil et grosses averses inattendues, « c’est l’automne ! » dit le portier de l’Africa.
L’effervescence du festival, portée par la gentillesse naturelle des tunisiens, personne ici ne se la joue, le dialogue est roi. En ce qui concerne les projections, j’ai décidé de privilégier la thématique subsaharienne, en jetant un œil sur d’autres productions dans la mesure du possible.

Dimanche. 15h au Palace, La chute de l’Ange, de Semih Kaplanoglu . Turquie, dans la sélection Aspects du cinéma turc contemporain. Peu de monde. Faut dire que la VO turque est sous titrée en anglais, ça limite. Par contre, je peux vérifier les dires d’un prof de philo de Djerba rencontré la veille, qui, se plaignant de la désaffection du public dans les salles, rajoutait : « par contre, c’est le dernier lieu où les couples sont tranquilles… » Oui certes, les places les plus éloignées des travées latérales sont toutes occupées par des amoureux qui s’en moquent comme d’un guigne de ne pas comprendre les dialogues. Pas assez passionnée par la projection, je la quitte, comme d’autres.

17h au 4° Art. : Compétition officielle Vidéo. Deux films, le premier, Le Projet du tunisien Ali Nahdi (26’) le deuxième, Une Affaire de Nègres de la camerounaise Osvalde Lewat (90’). Une foule compacte bloque la rue. On se bouscule et, finalement, les travées seront pleines de jeunes assis par terre. Presque tous venus pour faire un triomphe au jeune réalisateur tunisois qui présente son premier film, futé. Il raconte le quotidien d’un délinquant ordinaire, à un personnage du ministère de la culture censé l’aider à finaliser son projet. Discours d’une censure qui ne se reconnaît pas comme telle. Gros succès, suivi d’un sauve qui peut ; on se retrouve une poignée pour le film suivant. Dans la salle toute l’équipe malienne de Faro. Une affaire de Nègres enquête sur les disparus pendant la période du Commandement Opérationnel au Cameroun entre 2000 et 2001. La population qui avait applaudi à l’instauration de cette loi martiale destinée à diminuer le banditisme, découvre avec horreur qu’une simple dénonciation suffit à l’expéditive police pour enlever, séquestrer, torturer et tuer tout citoyen mâle quel que soit son âge. Longue quête de témoignages. L’avocat des droits de l’homme dira : « Dans ce pays, les gens préfèrent vivre à genoux plutôt que de mourir debout ! »

19H30 au Théâtre. Hommage à Sembene. Ceddo tourné en 1975. Film interdit par Senghor pendant 10 ans au Sénégal au motif que Ceddo ne devait pas prendre 2 d !!!! Dans un village, fin du 17ème siècle, traite négrière et arrivée de l’Islam, les Ceddo tentent de préserver leur culture traditionnelle et leur identité, sur fond d’enlèvement d’une princesse qui symbolise la résistance et le refus aux diktats ! Peu de monde dans la salle, les portables ne sont pas éteints, des gens discutent à haute voix, partent petit à petit. Les fidèles résistent comme Sembene, lui-même.

Michèle Solle (Clap noir)

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