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Critique "Il va pleuvoir sur Conakry"
Publié le : samedi 15 décembre 2007
Fespaco 2007

L’actrice principale du Film, Tella Pkomahou
lors de la projection du film

A lire le titre, on s’attend à un film sur la politique africaine. Mais, dès les premières images, le spectateur est surpris. Le son qui vient en anticipation sur l’image nous laisse entendre des soupirs d’un couple faisant l’amour. A l’image, nous entrons directement dans l’intimité de deux amoureux : Bibi, journaliste et caricaturiste et Kesso, jeune et jolie informaticienne.

Cheick Fantamady le réalisateur guinéen nous prend par la main mais aussi par les tripes et nous entraîne, à travers l’amour possible, impossible puis de nouveau possible de deux jeunes, a jeter un regard critique sur notre société qui est en proie à des maux tels que l’extrémisme et le syncrétisme religieux, la difficile situation des jeunes entre modernisme et tradition et enfin l’utilisation que le politique fait du religieux.

D’abord le résumé du film. Du haut de ses vingt ans, Bengali, dit BB, dessinateur - caricaturiste et fils de l’intraitable Karamo, imam et gardien de la tradition ancestrale de son village, se trouve devant une alternative délicate. Bien que désigné comme le digne successeur de son père, il ne peut se résoudre à suivre son destin et veut se battre pour exercer librement son métier et vivre pleinement son amour pour la belle Kesso, jeune informaticienne, au risque de s’attirer les foudres de son père.

La fiction rejoint et dépasse parfois la réalité de ce que nous vivons par rapport à la montée de l’extrémisme et du syncrétisme religieux. Croire en Dieu ou croire aux ancêtres.
Le père de Bibi, le grand Imam Karamo choisit lui de croire aux deux. Son choix, reflet d’une Afrique qui ne se retrouve pas toujours entre héritage traditionnel et religion révélée mine le développement d’une jeunesse qui ne sait pas forcément où se situer, qui suivre, comment se développer et que prendre chez l’autre de bon tout en n’occultant pas sa propre culture.

Le choix de mettre au centre de son film deux amoureux n’est sûrement pas fortuit de la part de Cheick. A travers la vie de bibi, Kesso et des autres, nous voyons défiler le problème du choix que les parents imposent aux enfants. Bibi serait Imam. C’est la décision du papa. Crainte de la malédiction paternelle, crainte de la répudiation de sa mère, le jeune homme ne peut que se résigner, quitte à perdre Kesso, la jeune et belle informaticienne, qui porte son enfant. Le volte face des jeunes, la coalition des mamans contre Karamo l’Imam montre aussi une Afrique qui se réveille et qui refuse la féodalité du père qui décide tout tel un dieu sur terre.

Résigné, l’Imam fait appel à la tradition. Il faut purifier l’enfant qui va naître, l’enfant adultérin. Après l’accouchement qui a eu lieu au village, lieu par excellence de la tradition en opposition à la ville, lieu de perdition, l’enfant sera simplement éliminé. La lignée est pure. Mais, le fils revient à la charge contre le père. Il n’accepte pas que pour paraître bien dans la société, son père est prêt à tout, même à tuer.

Voila un film à voir en famille car, les problèmes qui y sont soulevé mérite d’être discuté. Ce film annonce peut être le temps où les africains doivent revisiter leur passé en vue d’écrire un avenir où il fera bon vivre comme après une belle pluie.

Achille Kouawo

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