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La nuit de la vérité
Publié le : vendredi 5 janvier 2007

"La Nuit de la vérité", entrera dans l’histoire du cinéma africain comme le premier long-métrage d’une femme burkinabé. Fanta Régina Nacro, qui était déjà l’une des premières femmes africaines cinéastes, donne un autre tournant à sa carrière cinématographique en se lançant dans un long-métrage.

Au Burkina Faso, Fanta Régina Nacro est la première femme a avoir pénétré dans le monde du cinéma en effectuant le stage en tant que scripte pour "Yam Daabo" (Le choix) réalisé en 1986 par Idrissa Ouédraogo. Son premier film "Un certain matin", est un court-métrage réalisé en 1992, qui remporte le Tanit d’argent à Carthage. C’est la consécration pour Fanta Régina NACRO.

Avec "Un certain matin" (1992), la première fiction dirigée par une femme au Burkina Faso, et "Puk Nini" (1995), Fanta Nacro fût propulsée dans la cour des grands. Son court métrage, "Le truc de Konaté" (1998), sur la prévention du sida, récompensé par de nombreux festivals internationaux, dont le Fespaco 1999 et le Festival du court-métrage de Clermont Ferrand, révèle une cinéaste très engagée.

Pour son dernier film "Bintou", réalisé dans le cadre de la série "Mama Africa", Fanta Nacro fût inspirée par la lutte de sa mère pour la reconnaissance de son râle dans la société. Consécration suprême, le film est sélectionné à la quinzaine des réalisateurs à Cannes 2001 et a remporté et a remporté le prix du meilleur court-métrage au Fespaco 2001.

Une cinéaste très proche des préoccupations quotidiennes

Son cinéma à elle, se veut un cinéma de dénonciation qui brise les clichés tabous, un cinéma constructif qui propose. Sur un ton parfois caustique, mais plein de symbolisme, Fanta Régina Nacro aborde les sujets sans complexe. Elle veut titiller, susciter la réflexion…pour faire jaillir la lumière. Aussi choisit-elle des thèmes qui dérangent pour provoquer des discussions entre générations.

Même si elle se sent plus attirée par les sujets sociaux, elle leur donne une connotation politique, de par les situations en scènes de ses personnages. Dans "Puk Nini", en dénonçant l’infidélité conjugale, elle milite pour la stabilité familiale, socle de base de toute société. Dans "Bintou", elle met en scène l’itinéraire d’une mère combative et intrépide, qui se bat contre tous pour émanciper sa fille. C’est aussi un clin d’œil à toutes les femmes africaines qui, chaque jour que le soleil se lève, sont au four et au moulin. Image de femmes lève-tôt ici, images de femmes couche-tard là, symbole de la femme africaine luttant contre la misère pour s’émanciper. En tant que femme burkinabé et africaine, Fanta Nacro n’oublie donc pas les pesanteurs socioculturelles qui entravent l’épanouissement de ses sœurs.

Son premier long-métrage

Le cinéma africain a tout le temps collé aux réalités socio-économiques du continent. Aujourd’hui, les guerres et les conflits rythment la vie quotidienne de bon nombre d’Africains. Comment la cinéaste qu’elle est aurait pu rester insensible ? Les images seront chez elle le viatique pour dénoncer, critiquer et proposer un monde meilleur. Ici, l’art de la cinéaste devient un engagement au service de la paix, sans laquelle aucun développement n’est possible. Pour son premier long-métrage, elle a choisit la capitale, Ouagadougou, et Kamboisin (localité située à 25 km au nord de Ouaga) pour le tournage.

Dans ce long métrage loin de l’humour auquel nous avait habitué Fanta Nacro, ce sont des images poignantes et déchirantes causées par la guerre. En phase avec l’actualité du continent qui charrie cadavres blessés et déplacés de guerre, ce long-métrage se veut une interpellation des hommes politiques pour éviter la guerre des populations à cultiver le pardon et la vie en communauté. Fanta Nacro aboutit à une conclusion : les guerres ethniques avec leur cortèges de désolations, de rancœurs et de privations n’apportent rien à l’Afrique. Autant donc travailler à cultiver dans les esprits et les cœurs des Africains des valeurs humanistes.

Il faut promouvoir ces vertus et surtout et surtout sortir d’un conflit où tout doit être mis en œuvre pour réconcilier et oublier. C’est une thérapeutique nécessaire pour envisager l’avenir avec des réels motifs d’espoir. "Accepter la haine comme composante intrinsèque de tout homme, c’est commencer à pouvoir s’en défaire", confie Fanta Nacro. Ce premier long-métrage de Fanta Nacro a bénéficié de l’aide au scénario du festival d’Amiens et de l’aide à la réécriture du Centre National de la Cinématographie .Il est le fruit d’un long travail d’écriture en collaboration avec Marc Gautron, déjà partenaire d’écriture de Fanta Nacro pour "Puk nini" et "Le truc de Konaté"

Et demain ?

Après ce long-métrage, Fanta Régina Nacro ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Ainsi, après "La nuit de la vérité", elle travaillera sur deux sujets de long métrage "Le retour des sorcières" et "Le miel amer". Sacrée Fanta R. Nacro ! A 41 ans, elle n’a pas encore vidé son carquois. C’est tout à l’honneur du cinéma féminin africain.

Tiego Tiemtoré

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