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Adama Drabo
Publié le : dimanche 8 novembre 2009
Hommage





La mort du cinéaste malien survenue l’été dernier à Bamako suscite toujours une grande émotion dans le monde artistique africain. Il était, avec Cheick Oumar Sissoko et Souleymane Cissé, un des piliers du cinéma malien. Les manifestations en France comme Cinémas d’Afrique, Apt, Amiens ou Ciné regards africains lui rendent hommage en cette fin d’année.

Né en 1948 à Bamako, Adama Drabo enseigna pendant une dizaine d’années dans les villages tout en écrivant des pièces de théâtre. Rentré au Centre national de production cinématographique (CNPC) en 1979, il confirme son écriture dramaturgique par la pièce « Pouvoir de pagne » en 1983 et se forme trois ans plus tard à la réalisation au côté de Cheick Oumar Sissoko dans le film « Nyamanton ».

Il signe son premier long métrage en 1991 « Ta Dona » (Au feu !), film qui électrisa le Fespaco 91 et remporta le prix Oumarou Ganda de la première œuvre. Le cinéaste malien réalise ensuite « Taafé Fanga » (le pouvoir des femmes) en 1997 sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes et primé au Fespaco. « Fanta fanga » réalisé avec Ladji Diakité, son dernier film, est la seconde œuvre de la trilogie qu’il écrivait sur le pouvoir.

Ceux qui l’ont accompagné évoquent un homme passionné par son travail, cherchant toujours à l’améliorer. Il y avait une harmonie entre son projet cinématographique et sa vie ; l’organisation, le respect et la confiance le caractérisait. Il était très respectueux des femmes et de leur rôle dans la société. Les relations professionnelles qu’il tissait devenaient des liens affectifs en toute spontanéité.

Claude Le Gallou témoigne sur un homme profondément humain :

" Entre 1990 et 1998 je travaillais à ATRIA au niveau du développement des projets, et j’ai eu la chance de participer à la préparation puis à la réalisation et à la diffusion de "Ta dona" (1991) et de "Taafé fanga" (1997).
Lorsque je repense à Adama Drabo je revois avant tout son large sourire, un sourire chaleureux de père de famille proche de ses enfants ou de bon instituteur, un peu malicieux, un peu complice, un peu ironique...
Et nous avions bien l’impression de faire partie de sa grande famille ou de ses élèves, tandis que nous partagions les mangues et les arachides qu’il nous avait rapportées de son village au Mali...
Il entrait dans notre studio d’un pas tranquille. Je l’ai rarement vu stressé, en tout cas il ne le manifestait pas. Son inquiétude de réalisateur en cours de réalisation ou de montage se traduisait plutôt par des ulcères d’estomac récurrents qui le faisaient grimacer de souffrance, mais qu’il supportait héroïquement.

J’ai pu voir à travers la préparation et le déroulement de ses films à quel point il respectait non seulement son équipe technique et artistique, mais aussi les gens ou l’environnement qui allaient apparaître dans le scénario, que ce soit l’univers des paysans bambara et sa complexité, ou les villages du haut plateau dogon avec leurs interdits et leurs traditions...
Peut-être cette écoute et ce respect venaient-ils de son expérience d’instituteur et d’homme de théâtre, puisqu’en dehors de son métier de cinéaste il avait aussi été cela. Dans nos moments de détente il nous parlait de sa famille au Mali et de ses enfants, de l’éducation telle qu’il la voyait, des manguiers qu’il venait de planter dans ses champs, de ses tentatives de développement agricole écologique. Et c’était un peu comme si nous passions la journée là-bas avec lui, assis à l’ombre d’un arbre devant ces champs de terre rouge qu’il voulait développer.

Une année il avait voulu faire venir sa femme du Mali pour l’accompagner lors de la sortie de "Taafé fanga" dans un grand festival français. Mais le visa lui fut refusé... Et nous avons éprouvé honte et tristesse devant la blessure infligée injustement et sans raison à cet homme bon et généreux, cinéaste de talent par surcroit !..

A travers ses films et nos souvenirs Adama demeure avec nous, avec sa belle chaleur humaine.
Qu’il demeure aussi en paix dans sa terre natale auprès des siens. "

Claude Le Gallou / Benoît Tiprez

Pièces de théâtre

  1972 Massa
  1977 Le trésor de l’Askia
  1982 L’eau de Dieu tombera
  1983 Le pouvoir des pagnes

Filmographie

  1988 Nieba, la journée d’une paysanne
  1991 Ta dona
  1997 Taafé Fanga
  2003 Kokadjè, série télé
  2009 Fanta Fanga

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