Accueil > Articles > Bénindocs, clap de début
Bénindocs, clap de début
Publié le : lundi 26 décembre 2011
Cotonou, Porto Novo, Paris

Bénindocs, festival international du premier film documentaire, s’est tenu pour la première fois cette année, du 6 au 28 novembre 2011 entre Bénin et France. La programmation a eu lieu en réseau à Cotonou, Porto Novo et à Paris, aux ateliers Varan et au studio de l’Ermitage. Un relais itinérant au Bénin est prévu par la suite. La manifestation est parrainée par la comédienne Sandrine Bonnaire, qui constate – à juste titre ! - que « le cinéma africain n’est pas assez vu » et le documentariste béninois Idrissou Mora-Kpai : « C’est avec une immense satisfaction que j’accueille ce premier festival dédié uniquement au documentaire, un domaine du cinéma très marginalisé par ignorance. »
Parmi les 26 films programmés, on retrouve les meilleurs moments de la collection Lumières d’Afrique (en particulier Koukan Kourcia de Sani Magori, Les larmes de l’émigration d’Alassane Diago, Le collier et la perle de Mamadou Sellou Diallo, La tumultueuse vie d’un déflaté de Camille Plagnet), ainsi des films sur la musique (Moundanda Kisansi, à la poursuite du piano à pouce de Mue M’Puati Luemba, Zanzibar musical club, de Philippe Gasnier et Patricia Nezan) : l’ensemble offrant un voyage dans le continent africain.
Rencontre avec Arnaud Akoha, un jeune homme ambitieux, à l’origine de cette belle initiative.

Bénindocs est une initiative originale, comment est-elle née ?

Au départ j’avais pensé à un festival intitulé « la Semaine du documentaire à l’université », dans le but de toucher la jeunesse béninoise et faire savoir aux institutions la pertinence de concevoir le film documentaire de création comme une discipline universitaire. J’ai aussi soumis le projet aux membres d’Africadoc au Bénin puis en France. Tous l’ont apprécié. Ainsi, après avoir discuté du projet à Quintessence, avec Jean Odoutan et Gérard Le Chêne ; j’ai été rejoint par Farah Clémentine Dramani Issifou. Nous voulons que ce festival puisse favoriser la réalisation de films documentaires de création au Bénin, familiariser les populations béninoises aux films documentaires et rendre visible le premier film documentaire d’un jeune auteur réalisateur, quelle qu’en soit son origine ou sa nationalité.

Combien de temps faut-il pour mettre sur pied une telle manifestation ?

Belle question, surtout dans le contexte béninois où tout est à reprendre en matière de cinéma documentaire de création. Clémentine et moi, avons travaillé pendant un an pour que ce festival puisse exister. En somme, l’organisation de cette manifestation nous a coûté 84 heures de travail par semaine, entre octobre 2010 et novembre 2011 ! C’est toute une machine nécessitant des compétences que nous avons acquises au fur et à mesure. Heureusement, grâce à la bonne volonté de jeunes Français, Belges, Sénégalais et celle de nos amis du réseau Africadoc, le bénévolat l’a emporté sur… l’ergotage des structures à même de subventionner cet événement !

affi_benindoc

Pourquoi le documentaire plus que la fiction ? Est-ce le reflet d’un état des choses en Afrique de l’Ouest ?

L’adverbe « plus » m’embarrasse. Nous avons fait ce choix en fonction de notre association, qui promeut le genre « documentaire de création ». Nous ne sommes pas contre le genre « fiction ». Beaucoup d’initiatives sont prises, tant au Bénin que sur le continent, pour le développement du film de fiction. Il s’avérerait maladroit, - voire verser dans le conformisme (ce que nous n’aimons pas à Africadoc-Bénin) ! - de faire un festival qui mélange les genres cinématographiques. BeninDocs, festival international du premier film documentaire, n’est pas pensé uniquement pour rendre les films documentaires accessibles aux populations, nous avons aussi une préoccupation d’éducation - et d’excitation - à la réalisation d’images sur « nos » réels, que nous ignorons.

Pourquoi le choix (judicieux) des premiers films documentaires ?

(Sourire) Cette question revient souvent ! Le choix du premier film documentaire correspond à notre ambition de rendre visible les premiers documentaires. Vous convenez avec nous que le premier documentaire, qui fait d’un individu un réalisateur, trouve difficilement une place dans les festivals, compte-tenu de la présence de réalisateurs expérimentés, habitués des festivals. Pour permettre aux jeunes auteurs-réalisateurs de croire en eux-mêmes, nous avons accepté, aux côtés des premiers films, les seconds films. Avec le choix des premiers films documentaires, nous favorisons la mise en route de nouveaux talents.

Pourquoi et comment un événement au Bénin et à Paris ?

Les films de la programmation du BeninDocs portent la mention d’auteurs issus de tous les continents. A partir de ce moment, nous trouvons opportun de satisfaire le public parisien, qui voit très rarement les films documentaires de création africains, une idée que partage avec nous la marraine du festival, Sandrine Bonnaire. Paris est l’une des capitales du monde et la présence du BeninDocs à Paris est une manière de mettre les jeunes documentaristes européens, africains, asiatiques, américains et autres sous le regard du monde entier. Ce choix de la ville de Paris nous a été rendu possible par Farah Clémentine Dramani Issifou, qui s’est occupée des partenariats noués avec l’association Belleville en Vue(s), la Mairie de Paris qui a labellisé le festival BeninDocs, le CNC, Images en Bibliothèques et le Mois du Film Documentaire.

Quel accueil pour ces films à Porto Novo ? de la part du public ? quelles ont été les relations avec les institutions, les tv et les autres festivals ?

L’accueil a été très chaleureux à Porto-Novo, surtout à l’ouverture avec « Indochine, sur les traces d’une mère » d’Idrissou Mora Kpaï (parrain du festival). Beaucoup de gens aimeraient se procurer des DVD des films en programmation. La fréquentation a été autour de 200 personnes pour les cinq jours de projection au Bénin. Le public nous encourage à réaliser la phase itinérante dans les communes en 2012. Nos relations avec les institutions étatiques sont pour l’instant restées… administratives (et non participatives !) pour cette première édition. Même chose au sein des médias du Bénin. Cette attitude s’explique à mon avis, par leur faible connaissance, pour le moment, du cinéma documentaire de création. Néanmoins, nous sommes ravis de l’implication des institutions privées, telles que l’Ecole du Patrimoine Africain, l’Ecole Normale Supérieure, l’Institut Français, la Coopération Suisse ; ainsi que les média en ligne, les radios (la Radio Nationale du Bénin, Radio Nova, My afro Week, la Ville des Gens.net, Radio Planète) et certaines chaînes de télévision (Africa24, TV Carrefour) qui ont choisi nous accompagné pour cette édition 2011. En ce qui concerne les autres festivals, nous avons travaillé en partenariat avec le LOUMA 2011 (rencontre international du marché documentaire africain) au Sénégal et la vidéothèque des Etats Généraux du Documentaire en Ardèche (France).

Quel est le palmarès ?

La sélection de BeninDocs 2011 portait sur 26 films, parmi les 63 films documentaires reçus au titre de l’appel à film. Le festival est non compétitif.

Et la suite ?

Je pense que BeninDocs 2011 est rentré désormais dans les archives. Il faut se mettre au travail pour l’édition 2013 de cette biennale, sans oublier nos projets personnels de films. Parallèlement, nous sommes appelé à gérer la suite logique de la résidence d’écriture et d’initiation à la caméra animé par le réalisateur Sani Magori et la photographe Chloë Champion. Cette responsabilité, nécessite l’organisation en 2012 d’une résidence d’écriture et de réalisation où les quatre projets travaillés sur le festival BeninDocs vont être confrontés à d’autres regards pour une recherche de producteur. Idée qu’en 2013, ou entre deux éditions nous puissions avoir en production au moins deux projets de films destinés à la programmation de l’édition suivante.

Propos recueillis par Caroline Pochon
20 décembre 2011

Également…
1
>

Clap Noir
Association Clap Noir
18, rue de Vincennes
93100 Montreuil - France
Tél /fax : 01 48 51 53 75