Accueil > Archives > 2009 > Images d’Ailleurs menacé de mort
Images d’Ailleurs menacé de mort
Publié le : lundi 22 juin 2009
Conférence de presse Sanvi Panou

L’unique salle de cinéma parisienne qui projette régulièrement des films de l’Afrique et sa diaspora est menacée de fermeture définitive. Sanvi Panou, président de Images d’Ailleurs l’a annoncé avec émotion, au cours de la conférence de presse jeudi 11 juin donnée pour l’occasion à l’Espace St Michel à Paris.
Seul espace consacré à la visibilité de ces cinémas, l’équipe de Clap Noir soutien Sanvi Panou et rejoint la mobilisation pour obtenir le maintien des activités d’Images d’Ailleurs. Nous avons tous besoin de ce lieu ; s’il ferme, nous n’aurons plus rien pendant très longtemps et c’est tout un pan de la culture Noire à Paris qui disparaîtra.

Texte de pétition :

PDF - 35.6 kio

Qui est le cinéma Images d’Ailleurs ?

Images d’Ailleurs est un lieu qui a presque 20 ans. Il a été crée en 1990 par une association d’artistes et réalisateurs. Il constitue un lieu de mémoire et de résistance. C’est un lieu identifié par tous ceux qui pensent qu’il est nécessaire de montrer des œuvres peu diffusées, appartenant à des cultures plurielles qui, pour des raisons de rentabilité, sont rapidement décrochées des affiches. Images d’Ailleurs, c’est une vingtaine de films par semaine, 106 films en moyenne par an, des festivals et des rétrospectives chaque année (dont la dernière était consacrée à Aimée Césaire). Ce cinéma est classé art et essai. Comme tous les cinémas art et essai, il a une économie vulnérable et fragile. Sans nos partenaires, nous ne pourrions pas vivre. Nous avons des partenaires comme le CNC, la ville de Paris, le MAE pour certains festivals, l’OIF. Nous travaillons avec des dizaines d’associations qui investissent cet espace pour s’exprimer, pour rendre public leurs questionnements, au sein de la société et de leur culture. C’est un lieu de partage, de tolérance et de réflexion élargie. Images d’ailleurs, ce n’est pas le lieu de Sanvi Panou, c’est le lieu des cinéphiles, des associations, de ceux qui l’investissent.

Que se passe-t-il ?

Nous avons reçu une lettre recommandée du CE de la caisse d’épargne, notre propriétaire, nous signifiant de quitter les lieux, ne souhaitant pas renouveler le bail. Que s’est-il passé ?

Nous sommes régulièrement pénalisés par le CNC pour la vétusté des salles. J’ai honte d’accueillir des fidèles spectateurs dans ces conditions. Les fauteuils sont abimés, les salles ne sont pas confortables. Néanmoins, il existe un système dans ce pays pour entretenir les salles par une taxe sur la billetterie. Nous la payons chaque année (1000 à 1500 euros par mois). Cette taxe sert au propriétaire de la salle pour rénover régulièrement les salles. Rien n’a été fait. Comment on peut comprendre que nous payons cette taxe et que nos salles soient dans un état aussi déplorable ? A force de les agacer, nous avons vu miraculeusement arriver des fauteuils neufs il y a 3 mois ! mais nos propriétaires ont choisis de rénover la grande salle, que nous occupons pas souvent, au détriment de la petite qui nous est attribuée à 90% du temps.

Notre fréquentation a diminué. Au début, nous faisions jusqu’à 35.000 entrées mais maintenant, nous sommes descendus à 15.000 entrées. Nos problèmes avec le CE de la Caisse d’Epargne viennent de là. Comment une association peut-elle mettre près de 30.000 à 40.000 euros sur dix ans en malus, parce que les salles ne sont pas en bon état !

La situation d’Images d’Ailleurs est en danger, pourquoi ?

Nous sommes depuis plus d’un an mis en redressement judiciaire avec observation. Ceci veut dire que le tribunal nous a donné un an pour voir si Images d’ailleurs peut continuer ses activités. Ce n’est pas une liquidation. On a donc réduit nos charges et gardé juste un projectionniste. Ce sont des bénévoles qui tiennent la billetterie. Le tribunal nous a accordé un délai supplémentaire de 6 mois, au regard des efforts mis en place, et la possibilité de planifier sur 10 ans une nouvelle organisation de nos activités.

 Si le tribunal apprenait que nous n’étions plus dans nos salles, la liquidation serait prononcée.

 Si nous partons en avril comme il le souhaitait, nous n’aurions plus de subventions, qui arrivent en ce moment.

Pour ces 2 raisons, nous serions victimes d’une double peine, alors que le tribunal était favorable à la continuité de nos activités.

Quelle a été la réaction d’Images d’Ailleurs face au danger imminent ?

J’attends maintenant le jugement du tribunal pour savoir si nous sommes en redressement judiciaire au regard de cette lettre que notre propriétaire, le CE de la Caisse d’Epargne, nous a envoyé pour mentionner qu’ils ne souhaitent pas renouveler notre bail. Nous avons reçu un mail encourageant d’une partie des délégués syndicaux du comité d’entreprise, ce qui prouve qu’au sein du CE, ils ne sont pas tous d’accord. Mais je ne suis pas très optimiste.

J’ai demandé à nos amis de la caisse d’épargne de venir au CNC, pour leur expliquer que leur mesure était précipitée et grave et qu’il est impératif pour nous de rester dans les lieux, pour les deux raisons évoquées.

Un lieu de la culture noire est indispensable

Il y a une maison du Japon, l’institut du monde Arabe. Pourquoi ne pas avoir une maison des arts et de la culture Noire ? C’est une aventure collective à l’image de la création du théâtre du soleil auquel j’ai participé avec Ariane Mnouchkine. En attendant, il faut réinvestir le cinéma Images d’ailleurs, La Clef, sinon nous n’aurons plus de lieux du tout.

Question de la salle

Lors du dernier Fespaco, Mr Johannet secrétaire d’Etat à la coopération avait annoncé une politique de diffusion des films en France, est ce qu’elle ne pourrait pas servir le maintien d’une structure comme la vôtre ?

Bien sûr si ce Monsieur a dit cela, il faut qu’on se rapproche tout de suite, pourvu que ce ne soit pas un vœu pieux ! Mais il n’y a pas de visibilité de la culture noire en France. Où sont programmés les films du Fespaco ? C’est toujours les mêmes qui sont là, blancs et noirs, qui parlent de la culture en France. Les médias ne couvrent pas les évènements, les télés ne programment pas les films.

Laurent Douin, Secrétaire des verts du 5ème arrondissement

Nous voulons vous témoigner notre soutien au cinéma Images d’Ailleurs, car c’est un lieu de partage, de réflexion, auquel nous sommes attachés. Vous nous avez permis d’organiser une manifestation avec votre collaboration à l’occasion notamment du film « Le monde selon Monsanto ». Nous sommes conscient du rôle que vous jouez dans le quartier, par la qualité de la programmation et du fait que vous êtes une fenêtre qui ouvre sur des visions du monde, rare. Nous demanderons au maire de Paris de s’investir directement. votre combat est juste et nous vous soutiendrons.

Marie Claude Godon, agent artistique

Depuis 14 ans, je représente des comédiens noirs et vous avez été formidable. Il y a Eric Ebouaney içi, du film Lumumba, de Raoul Peck, cela n’a pas été facile pour ce film. Eh bien Mr Panou l’a gardé au cinéma Images d’Ailleurs pendant 3 ans ! Et je lui dis merci.

Hamadou Eddie Barkan, écrivain poète africain

Nous, artistes africains, nous soutenons Images d’ailleurs. Il faut mettre en place une médiation, c’est un appel car c’est très grave. Nous avons besoin de cette structure. Comme je le dis dans un de mes poèmes, « mais comment voulez-vous que je me soumette ? » et là, on ne vas pas se soumettre ! C’est la seule structure qui nous renvoie ce que nous sommes et cet espace de partage est indispensable. Il s’agit de se battre et il n’est pas question de fermer Images d’ailleurs car nous en avons besoin !

Une fidèle spectatrice

Nous avons tous besoin de ce lieu. Car je ne suis pas noire, mais j’aime le cinéma africain, je vais dans tous les endroits où passe cette diversité, je tiens à voir ces films d’ailleurs, toute ma vie durant et je voudrais qu’on se batte sur le lieu où nous sommes avant de discuter des autres projets.

Benoît Tiprez, Caroline Pochon

À télécharger

  • info document (PDF - 35.6 kio)
    • Le 9 juillet 2009 à 14:44, par E. Briere

      IMAGES D’AILLEURS joue un role important pour les enseignants et chercheurs en litteratures et cultures d’Afrique. C’est lÀ que je me rends depuis des annees lorsque je viens en France pour mes recherches, car comme Presence Africaine et d’autres lieux afro-parisiens, ce cinema tient lieu du centre culturel africain qui fait cruellement defaut À Paris.

      • Le 10 juillet 2009 à 16:51

        Il y a qqes mois circulait sur internet une pétition pour "sauver" les films de Pierre Etaix avec semble-t-il un certain succès. Espérons que la toile puisse bénéficier de la même manière à Image d’Ailleurs et permettre à cette institution parisienne de la diffusion des cinématographies africaines de continuer son travail indispensable.

        Philippe STROUN, Réalisateur

    • Le 14 juillet 2009 à 16:35, par Bernard GILLET

      Bonjour,
      Présent et intervenant le 11 juin, j’ai écrit un message d’appel au lien suivant :
      http://www.lepost.fr/article/2009/06/13/1576386_images-d-ailleurs-doit-etre-sauve.html
      Nul besoin d’en rajouter.
      J’espère qu’en un peu plus d’un mois la situation s’est éclaircie.
      Bonne chance à Sanvi PANOU et à tous ceux qui se battent pour maintenir cet espace de diversité culturelle.

      Voir en ligne : Bonne chance

      • C’est regrettable ce qui arrive au cinéma Images d’Ailleurs. Cependant, il fallait s’y attendre. 20 ans de gabegie et de gestion calimiteuse de la part de son directeur ne pouvait que conduire cett belle initiative à sa ruine. C’est dommage à dire mais le manque de sérieux n’ammene aps loin.

    Également…
    1

    Clap Noir
    Association Clap Noir
    18, rue de Vincennes
    93100 Montreuil - France
    Tél /fax : 01 48 51 53 75