Moussa Touré présente « La Pirogue » à Cannes, seul film d’Afrique subsaharienne sélectionné dans cette édition 2012. Avec ce 2eme long métrage, film politique sur la tragédie de l’immigration clandestine, le réalisateur sénégalais rentre dans la cour des grands du cinéma.
DR. Photo © Bettmann/Corbis
Le continent est toujours peu représenté à Cannes, malgré le retour en force de l’Afrique du Nord forte de son industrie cinématographique, notamment grâce aux productions marocaines.
Cette année, six réalisateurs dont cinq du Nord défendront les couleurs du continents : Yousry Nasrallah foulera le tapis rouge en sélection officielle avec « Après la bataille », Nabil Ayouch présentera dans Un certain regard « Les chevaux de Dieu » ainsi que Moussa Touré « La pirogue ». Du coté du off, à La quinzaine des réalisateurs, Rachid Djaïdani présente « Rengaine » au coté de Merzak Allouache (« Le repenti »). « The Curse » signé par Fyzal Boulifa, concourera quant à lui dans la sélection court métrage.
Des films peu visibles
Les films existent mais l’absence de salles de cinéma sur le continent est criante. Il n’y a pas de politique culturelle suffisamment engagée par les États en faveur du cinéma. Quelques soutiens institutionnels existent (Burkina Faso, Sénégal, Bénin) mais surtout dans les intentions. Sur le terrain, les productions manquent de moyens et les films sont peu visibles.
La pirogue © DR
Les cinémas d’Afrique Noire sont en majorité toujours financés par les guichets européens, parfois à 100% mais ne sont pas beaucoup plus visibles en France dans les circuits officiels. Pourtant, les efforts sont loin d’être négligeables et il est possible de les mesurer d’après la batterie de moyens déployés par la France en faveur des cinéastes du Sud à Cannes. Chaque année, l’Institut Français y organise Le Pavillon Les Cinémas du Monde, un lieu de création et de promotion des cinématographies du monde en partenariat avec l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) et les médias France24, Monte Carlo Doualiya, RFI, TV5MONDE et Canal France International (CFI). Le Pavillon propose entre autres de nombreuses rencontres professionnelles, « La fabrique des cinémas du Monde » et met en avant de grands projets comme « Des cinémas pour l’Afrique » mené par Abderrahmane Sissako et Juliette Binoche en 2009. Qu’en est-il de ces actions ? Cette année, plusieurs plans de soutiens seront mis en œuvre. Un bien pour un moindre mal ?
En parcourant les programmes des chaînes de télévisions françaises, qui fêtent le cinéma et font la part belle aux grands films pendant le Festival de Cannes, seul un film africain est programmé « Tsotsi » de Gavin Wood (Afrique du Sud) sur France Ô (chaîne de l’Outre-mer). Si ces cinémas sont fort heureusement soutenus par la France, leur visibilité demeure absente depuis longtemps dans les grands festivals et les chaînes de télévisions françaises.
Cela soulève une question de fond : pourquoi les cinémas d’Afrique suscitent-ils toujours un grand intérêt dans les circuits institutionnels du monde entier mais restent à l’écart des circuits de distributions professionnels ? Ne faudrait-il pas remettre en cause la facture de nombreux films – l’aide aux productions n’est jamais soumise à la distribution de l’oeuvre - qui ne reçoivent pas l’écho favorable des programmateurs français ? Que faut-il que cette riche et belle cinématographie nous montre pour être visible ?
Benoît Tiprez
Le site officiel du Festival de Cannes
Le site de La quinzaine des réalisateurs
Le site Le pavillon des cinémas du monde
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