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Bande son en délire
Publié le : dimanche 29 mars 2009
Sektou, ils se sont tus...

Khaled Benaissa
Poulain d’Or du court-métrage au Fespaco 2009

Né en 1978, baigné dès son plus jeune âge dans le monde du théatre où il suit son père, le dramaturge algérien Slimane Benaïssa, le jeune réalisateur Khaled Benaissa a déjà une bonne expérience de comédien pour le cinéma lorsqu’il réalise son premier court-métrage en 35 m, en 2009 : "Ils se sont tus" ("Sektou"), 17 minutes de bonheur ludique dans une rue d’Alger imaginée par un cinéaste qui ressemble plus à Kusturica qu’à ce que l’on a jusqu’à présent l’habitude de voir au Fespaco. Son cinéma est comme lui, espiègle, fantasque, à la fois enfantin et surréaliste. Nous avons eu le plaisir de le découvrir lors du Fespaco.

C’est l’histoire d’un mec !... il travaille à la radio à Alger et quand il rentre le soir, très tard, les bruits de sa rue, ceux des voisins qui se disputent, ceux des voitures, ceux du quartier, ceux des marchands de fruits et légumes, ceux de sa ville et même le téléphone l’empêchent de dormir et envahissent son espace mental. Son oreille en devient géante. Sa perception devient paranoïaque. Et c’est ainsi que le personnage se retrouve propulsé hors de son lit, et même à un moment englouti dans un amoncellement de patates ! Ou aux prises avec des gens avec qui il n’a pas envie de parler. Scènes cocasses ou absurdes. Tranches de vie. Une manière ludique de vivre le quotidien d’une rue d’Alger aujourd’hui.

Au Fespaco, la plupart des court-métrages ont un message à faire passer (de la souffrance des enfants malades comme dans le beau et classique "Sauver Rama" de Tahirou Tasseré Ouedraogo, du Burkina Faso, aux divers drames qu’engendre la pauvreté comme dans le par ailleurs très émouvent "Sarah Mouka" (liberté provisoire), de Naoufel Barraoui, du Maroc, où un père découvre que sa fille se prostitue pendant son absence), en tout cas, une émotion forte à proposer. Khaled Benaïssa, lui, se pose radicalement autrement : il est le seul, et peut-être dans le Fespaco tout entier, car cette année, Jean-Pierre Mbekolo ne présentait pas de film, à s’interroger sur la forme, à tenter des effets de style, à ne pas avoir d’histoire, à s’amuser avec le cinéma. Par exemple, dans son film, la bande son délire complètement. Montage son qui désynchronise volontairement, musique variée. Il y a même des passages totalement silencieux. C’est marrant.

Alors, bien sûr, cela a tous les défauts et les maladresses du premier film : on veut tout dire, on en dit trop, on en fait trop, on démontre, on pirouette, on cabotine. Mais il y a la promesse d’une écriture cinématographique, une liberté de ton, une fraîcheur que les jurys du Fespaco ont su reconnaître puisqu’ils ont donné au jeune cinéaste algérien le prix du court-métrage. A suivre !

Caroline Pochon

Fiche du film Sektou, ils se sont tus...

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