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Inalco en colère : obligé de remettre son prix à la sauvette
Publié le : lundi 23 mars 2009
Entretien avec Gaël Brunet, du prix Inalco au Fespaco

Le onzième prix de l’ INALCO* (Langues O), inauguré en 1989, a cette année été remis, mais seulement à la sauvette, en marge du FESPACO officiel. La remise des prix spéciaux s’est très mal passée pour nous. Je n’ai appris qu’en entrant dans la salle que j’étais persona non grata !...

Pour avoir le droit de donner un prix cette année, il fallait verser 1 million de francs CFA à l’organisation du Fespaco, en plus du prix ! Notre prix, traditionnellement une caméra vidéo HD, était cette année d’une valeur de 3 millions de francs CFA, tout était déjà budgetisé quand j’ai appris la nouvelle : impossible d’obtenir une rallonge d’un million en janvier.
Le nouveau délégué général a parlé de "partenaires crédibles", mais quand on voit les partenaires officiels, ce ne sont que des banques (Ecobank, Bank of Africa) ou des organismes internationaux (UEMOA, CEDEAO, Unicef). Il faut avoir les moyens pour être un partenaire crédible ! Pas crédible l’INALCO ? Nous enseignons 14 langues africaines, nous avons fait 14 ans de ciné-club africain hebdomadaire (bon nombre de personnalités actuelles du FESPACO ou de la RTB, alors étudiants, en ont été des spectateurs assidus), j’y enseigne l’histoire des cinémas africains depuis 21 ans et je suis présent au FESPACO depuis 1985. Idrissa Ouedraogo, Gaston Kaboré, Dani Kouyaté, Adama Drabo, Jean-Marie Teno ont donné des conférences, animé des débats ou sont venus présenter leurs films dans notre institut…

Je m’interroge également sur le sens d’une autre « innovation » 2009 : les jurys des prix spéciaux devaient comprendre une personne désignée par le FESPACO. Que signifie cette mise sous tutelle, qu’en est-il de la souveraineté du jury ? Heureusement, il s’est trouvé que notre membre supplémentaire était une connaissance de longue date et que nos délibérations ont été passionnantes !
Je suis déçu et perplexe face à cette nouvelle organisation. Je m’interroge sur la manière dont nous pourrons renouer avec le festival pour la prochaine édition, surtout à une période où nous réfléchissions aux moyens de pérenniser notre partenariat.
Du coup, nous avons remis notre prix en indépendants, mais entourés par plusieurs de nos anciens lauréats, qui ne nous mégotent pas notre « crédibilité ». Nous l’avons remis à Amor Hakkar pour "La maison jaune". Ce film est une épure esthétique, il se laisse voir sans aucune arrière-pensée politique ou sociologique. Le bonhomme est sur sa pétrolette au milieu du paysage. L’émotion est suscitée par la réalisation, pas par un discours. C’est un film qui se suffit à lui-même. En plus pour l’INALCO il est en langue berbère (chaoui). Il ne s’inscrit pas dans un genre, il ne cherche pas à faire américain à tout prix, comme par exemple "Jérusalema", ou encore comme le film de Mama Keïta "L’absence" qui tourne un peu à la série B à mesure que le film avance. Notre jury avait aussi une tentation pour "Teza" d’Haïlé Gerima, mais c’est un film dont la compréhension nécessite un bagage historique, alors que "La maison jaune" se voit "tout seul" et s’est donc imposé à nous comme une évidence. Nous prévoyons prochainement une projection à l’INALCO avec le réalisateur.

INALCO* : Institut National des Langues et Civilisations Orientales

Les précédents « Prix de l’INALCO » :

1989 – Yaaba d’Idrissa Ouedraogo
1991 – Ta dona d’Adama Drabo
1993 – Hyènes de Djibril Diop Mambety
1995 – Guimba de Cheick Oumar Sissoko
1997 – Buud yam de Gaston Kaboré
1999 – La vie sur terre d’Abderrahmane Sissako
2001 – Sia, le rêve du python de Dani Kouyaté
2003 – Abouna de Mahamat Saleh Haroun
2005 – Zulu love letter de Ramadan Suleman
2007 – Ezra de Newton Aduaka

Propos recueillis par Caroline Pochon

  • Le 26 mars 2009 à 15:50, par Gaël Brunet

    "En colère"-le titre n’est pas de moi- ce que nous avons ressenti est plutôt de l’ordre de la déception...amoureuse. Trois jours pleins pour obtenir badges et passes pour toute l’équipe, quatre jours intensifs de visionnage des films, vendredi délibération finale et ...la mauvaise surprise. Nous n’avons jamais eu l’occasion d’expliquer notre situation (l’équipe du bureau des prix spéciaux n’est pas en cause, nous les avons vu se démener au lendemain de nuits blanches). Je suis indulgent pour les failles de l’organisation, je comprend les difficultés financières ; reste le "partenaires crédibles" qui m’est resté au travers de la gorge. Notre soutient aux cinémas africains demeure indéfectible.
    Gaël Brunet

  • ce Monsieur tient un discours d’une autre époque.
    D’abord ce Monsieur dit un mensonge, l’information sur les conditions des prix spéciaux, il l’avait au moins 3 mois avant le festival.
    Quel mal y’a t-il, pour un festival de l’envergure du fespaco, de miser sur la crédibilité de ses partenaires.
    Il faut rompre avec le désordre qui permettait que n’importe qui vienne faire n’importe quoi au fespaco, sans que le fesopaco n’y soit associé. Ne refuser pas le droit au fespaco, de veiller et surveiller tout ce qui se passe dans son cadre (comprenez la présence d’un observateur du Fespaco dans les jurys "prix spéciaux")

    Si ce Monsieur est honnête il nous dira que le désordre qu’il voudrait voir se perpétué au Fespaco, et dont il a pendant longtemps profité, ne peut se faire dans aucun festival du Nord.

    alors qu’il cesse de dénigrer systématiquement TOUT.

    Je suis d’avis que l’organisation de cette édition était calamiteuse mais de là à dénigrer les changements positifs que la nouvelle équipe insuffle....

    • La critique et la remise en question sont-ils possibles au Faso ? A fortiori lorque l’on est étranger ? Oui si l’on en croit le DG du Fespaco lui-même qui admet quelques failles dans son organisation. Alors pourquoi voir un déséquilibre Nord-Sud dans cette affaire ? La photo du "Monsieur" en question aurait-elle suscitée des préjugés en remplacement d’une analyse ? Saluons le courage de M.Ouégraogo, les ruptures passent aussi par l’honnêté intellectuelle sinon elles restent verbales ou pire ne sont que destruction de l’existant. Ensuite viens le dialogue, que serait un festival international sans participants internationaux ?

      Voir en ligne : Michel Ouédraogo, DG du FESPACO : “ C’est un travail humain, tout n’est pas parfait”

      • Bonjour
        J’ai lu votre intervention. Je pense qu’il faut arrêter de trouver des excuses à une personne qui ne fait pas bien son travail. Aujourd’hui, il est difficile, voire inadmissible, de rater une telle organisation et de dire que la perfection n’est pas de ce monde.

        Inalco et bien d’autres associations ont durant de longues années offert des prix. Personnes n’a eu à dire ou à parler d’une quelconque malhonnêteté intellectuelle dans les prix spéciaux offerts. Alors, pourquoi le Fespaco veut-il s’immiscer dans cette activité maintenant ? pourquoi parler de crédibilité ? Nous qui avons suivi ce festival de loin, nous avons l’impression que le nouveau patron à des comptes à régler avec l’ancien patron. Bon, qu’il fasse ce qu’il veut et qu’il montre ce qu’il vaut, c’est mieux que de vouloir montrer du doigt tout le monde. Comme si... le seul qui est bon, c’est lui.
        L’avenir nous le dira, mais le fespaco à besoin de responsable efficace, qui sache allier diplomatie à compétence.

        Merci et bon vent au Fespaco

  •  Passons sur les "n’importe qui, n’importe quoi" et autre "mensonge". Le ton de "ce Monsieur" est fort déplaisant. Confier son désappointement n’est pas "dénigrer systématiquement" et le mot "calamiteux" est de mon contradicteur. Je pense que le Festival est suffisamment adulte pour ne pas prendre ombrage de critiques émanant de ses plus fidèles soutiens.
     Profiter du FESPACO ? Les journalistes, enseignants et étudiants qui nous ont fait l’amitié de participer à nos jurys l’ont fait à leurs frais. Et onze cinéastes ont bénéficié d’une caméra vidéo HD depuis la création de notre prix.
     Méfions-nous des ruptures proclamées, elles nécessitent du doigté plus que de l’autoritarisme, et ne font souvent qu’ajouter à la confusion. Le climat d’échange et de compréhension qui a prévalu jusqu’à présent me semble préférable.
     Je ne veux pas envahir davantage les colonnes de Clap noir, ni provoquer d’inutiles polémiques. Nous n’avons pas su cette année nous insérer dans la nouvelle donne et nous le déplorons. Permettez-moi de clore ce débat et de me tourner vers l’avenir.
    Gaël Brunet

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