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« L’intérêt pour le cinéma africain est croissant »
Publié le : jeudi 9 février 2012
Interview de Dorothee Wenner, déléguée à la Berlinale

L’Afrique est souvent le parent pauvre des festivals internationaux. Pourtant, cette année, le festival de Berlin présente de nombreux films et documentaires d’Afrique et du Maghreb. Dorothee Wenner [1], déléguée à la Berlinale pour la sélection des films africains, nous parle de l’évolution de la place de ce cinéma au festival de Berlin.

Comment évaluez-vous la sélection des films africains cette année ?

Je dois dire que je suis très contente et très satisfaite. Ces films sont le signe que le cinéma africain sort d’une niche, si je peux me permettre l’expression, pour atteindre une portée internationale. Je pense non seulement aux films de la sélection, mais aussi à ceux présents dans le cadre de l’initiative World Cinema Funds (qui soutient la production cinématographique dans des pays où l’infrastructure est trop faible ou inexistante, ndlr). Tout cela est en mouvement. Ainsi, c’est une très grande nouvelle d’avoir un film sénégalais en compétition.
Cependant, avec le jeu des coproductions, il est parfois difficile de définir ce qu’est un film africain. Pour moi, la définition doit être suffisamment large, car ce qui importe, c’est ce que le film dégage, par sa thématique, son équipe, son positionnement. Ce qu’il dit de l’Afrique en somme. Pour prendre un exemple, le film Aujourd’hui d’Alain Gomis qui nous parle de ce qui est important en Afrique, a une narration et un langage visuel très africains, même si c’est une coproduction française et que son réalisateur vit à Paris. Ou encore, le film français Habiter/construire de Clémence Ancelin, qui sous le prétexte de la construction d’une route au Tchad nous fait découvrir le quotidien des nomades et des travailleurs du pays.

Existe-t-il des thèmes communs dans les films que vous avez vus ?

C’est difficile à dire, tant ils sont divers. Mais il est vrai que des sujets comme les bouleversements du monde, ou encore la migration ont une grande place dans le cinéma africain. D’autres, propres aux productions africaines, comme le lien à la famille et à sa terre, la mémoire des personnes disparues, m’ont également beaucoup touchée.

Comment se passe la sélection pour la Berlinale ?

La recherche des films débute plus d’un an avant le festival. Nous avons pour cela de nombreux ressorts. Tout d’abord un large réseau de délégués de la Berlinale, chargés des différentes régions du monde, réalisent une veille. Au travers des coproductions, en particulier avec la France, nous pouvons aussi identifier les films à suivre. Il existe également de plus de plus de festivals de cinéma en Afrique. Nous sommes par exemple associés à celui de Durban, en Afrique du Sud. Je m’y suis rendue cette année et ai pu voir de nombreux films qui pouvaient également potentiellement être à Berlin.
Citons également des initiatives de la Berlinale comme Co-Production Market ou Talent Campus (qui réunit plus de 350 jeunes cinéastes du monde entier pour un networking de six jours, afin de découvrir les métiers du 7ème art, ndlr). Enfin, la radio Deutsche Welle (l’équivalent de RFI) organise des séminaires de formation à la création de festivals et d’événements pour des professionnels venus d’Afrique et d’Asie. Tout cela nous aide donc à étendre notre réseau de connaissances et à identifier les films intéressants, parfois même dès l’écriture du scénario.

Diriez-vous alors que la place du cinéma africain va grandissant à la Berlinale ?

Oui, nous le souhaitons et faisons tout pour cela ! Je remarque que l’intérêt pour l’Afrique en général augmente d’année en année. Mais cela croît dans les deux sens, puisque les réalisateurs africains s’intéressent aussi de plus en plus à la Berlinale.

Propos recueillis par Gwénaëlle Deboutte

Lire l’article "Un film africain en compétition"

1 - Dorothee Wenner exerce en tant que réalisatrice indépendante, auteur et curatrice, à Berlin. Elle travaille entre autres pour la Berlinale, le festival du film de Durban et pour l’African Movie Academy à Lagos. Elle a actuellement en projet une fiction et un documentaire, Drama.Consult.

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